Habituée depuis des années à battre des records d’exportation, la filière française des cosmétiques et des parfums se pensait protégée contre les multiples facteurs qui ont rayé du territoire hexagonal une grande partie du tissu industriel. L’arrivée de Donald Trump a introduit un grain de sable potentiellement dévastateur dans un mécanisme qui semblait bien huilé.
Double peine
Avec près de 3 milliards d’euros expédiés en 2024 — pour moitié des parfums — les États-Unis sont la première destination des exportations françaises de cosmétiques. Mais la politique commerciale mise en œuvre par l’administration Trump et la capitulation de l’Union européenne ont brusquement changé les règles du jeu.
Les droits de douane, qui étaient nuls ou quasi-nuls pour une grande partie des produits cosmétiques exportés vers les États-Unis, sont ainsi passés à 15% à la fin du mois de juillet 2025. À cela ce sont ajoutés des droits additionnels de 50% sur certains composants métalliques des emballages (19 août 2025). À ce choc tarifaire s’est ajouté la volontaire dépréciation du dollar, qui a mécaniquement renchéri les coûts des produits européens entrant sur le marché américain.
Cette double peine, pourrait entrainer, selon le cabinet Astérès, une baisse de 21% des exportations françaises de parfums et cosmétiques vers les États-Unis en 2026, soit une perte de 620 millions d’euros de chiffre d’affaires. Une chute qui, si elle n’était pas compensée, pourrait se traduire en pertes d’emplois, jusqu’à 2700 emplois directs et de 8200 emplois indirects chiffre Astérès.
Premiers effets
Dans les faits, les dernières données douanières disponibles montrent effectivement une chute de 12,7%, des exportations françaises de cosmétiques vers les États-Unis au premier semestre 2025 — donc avant l’entrée en vigueur des nouveaux droits de douane. Ce recul s’explique surtout par des effets de stocks liés aux anticipations des importateurs fin 2024.
Si l’on observe les résultats trimestriels publiés par les groupes côtés, comme Interparfums ou L’Oréal, depuis l’entrée en vigueur des mesures tarifaires, l’effet sur les ventes ne semble pas évident. Dans l’ensemble, elles se maintiennent, voire progressent. Mais l’effet de change lié à la baisse du dollar annule quasiment tous les gains réalisés.
Par ailleurs, des réorganisations des chaînes de valeur sont incontestablement en cours. Les géants comme L’Oréal, The Estée Lauder Companies ou Procter & Gamble, ont indiqué rationaliser leurs flux afin de produire au plus proche de leurs clients. Ces mesures vont d’abord concerner les articles les plus sensibles au prix, comme le maquillage ou les soins capillaires.
Plan d’action
Face à des perspectives jugées alarmantes, la FEBEA appelle à la mobilisation forte autour de son Beauty Industry Package, un plan d’action pour protéger la compétitivité de l’industrie française des cosmétiques et parfums.
La feuille de route mêle : diversification des exportations via de nouveaux accords de libre-échange, consolidation du marché européen en facilitant la circulation des produits fabriqués en Europe, simplification du cadre normatif et meilleure lutte contre les pratiques illégales, telles que les contrefaçons ou les mises sur le marché illicites.
« Nous ne pouvons pas rester spectateurs. Nous demandons à nos décideurs européens et français de nous donner les moyens de maintenir notre leadership mondial, sans complexifier inutilement notre cadre d’action », alerte Emmanuel Guichard, Délégué Général de la FEBEA.
























