Rien qu’en Europe, plus de 9600 petites et moyennes entreprises (PME) opèrent sur le marché des cosmétiques, qui représente 104 milliards d’euros selon l’association professionnelle Cosmetics Europe. Le nombre de startups est en plein boom, avec plus de 2000 startups beauté en France et plus de 1000 au Royaume-Uni.

Mais quelle est l’importance réelle de ces startups sur le marché de la beauté ? Et quel est l’intérêt des grands groupes de cosmétiques pour les idées et les innovations issues de ces équipes plus petites ?

Deux des plus grandes entreprises de cosmétiques au monde, L’Oréal Groupe et Estée Lauder Companies, ont abordé ce sujet lors du salon Cosmetic 360 qui s’est tenu le mois dernier à Paris. Elles ont détaillé le fonctionnement de leurs programmes d’accélération et d’accompagnement, conçus pour intégrer des idées, des talents et des produits innovants. Selon les dirigeants de ces deux entreprises, startups et entrepreneurs sont essentiels à l’avenir du secteur de la beauté.

Un paysage en pleine transformation

Adonis Bouzid, Global Director Open Innovation for Digital & Marketing chez L’Oréal Groupe, souligne que le géant des cosmétiques est constamment à la recherche de startups innovantes avec lesquelles collaborer. Station F Beauty Tech, l’accélérateur de startups de L’Oréal, a ainsi été créé en 2018 afin de permettre au groupe de rester à la pointe de la technologie. Depuis, il a accompagné 88 startups du monde entier et investi environ 260 millions de dollars dans ces entreprises.

« La mission de l’accélérateur Station F Beauty Tech de L’Oréal est d’identifier de possibles partenaires, en particulier des startups qui peuvent être financièrement fragiles mais qui ont un fort potentiel », a-t-il indiqué aux participants de Cosmetic 360. Ces startups sont ensuite intégrées pendant six mois pour travailler sur le développement de produits et des projets pilotes, afin de déterminer si une collaboration à long terme est pertinente pour les deux parties.

Le groupe L’Oréal recherche des caractéristiques très spécifiques lorsqu’il analyse le marché pour identifier des startups éligibles, notamment la résilience, la rapidité d’exécution et la capacité d’adaptation, insiste Adonis Bouzid auprès de Premium Beauty News.

Selon lui, « nous vivons à une époque où les domaines du numérique et du marketing connaissent de multiples transformations ». L’IA se développe rapidement et, dans un contexte de tensions politiques mondiales persistantes, l’accès aux capitaux est de plus en plus difficile. Par conséquent, la capacité à maintenir le cap, à avoir une vision claire et à répondre aux attentes est primordiale.

Par ailleurs, la capacité à obtenir des résultats rapides « compte énormément », compte tenu de la forte concurrence qui règne aujourd’hui dans le secteur des startups de la beauté, souligne Adonis Bouzid. « Et puis (…) du fait de cette nécessité de maintenir le cap et d’arriver rapidement au but, le dirigeant de la startup doit être une personne particulièrement brillante, notamment dans le domaine du marketing. Je dirais que les fondateurs qui effectuent plusieurs ajustements stratégiques dans le cadre d’un programme d’exécution de six mois deviennent de plus en plus la norme ».

Argent, temps et énergie

Pour Lucas Nanini, Vice-Président de l’Innovation Parfum chez The Estée Lauder Companies, les start-ups qui souhaitent collaborer avec les grands acteurs du secteur doivent impérativement prendre en compte deux priorités clés : l’argent et le temps.

« Dans les faits, la priorité numéro un est de gagner de l’argent et la seconde, de gagner du temps », a déclaré M. Nanini aux participants. Ainsi, lorsqu’une grande entreprise de cosmétiques intègre une startup ou souhaite investir dans une nouvelle idée, celle-ci doit être financièrement prometteuse, permettre de gagner du temps ou d’optimiser les ressources.

Selon Lucas Nanini, les startups se caractérisent généralement par une grande agilité et des délais de mise en œuvre courts, contrairement aux grandes entreprises du secteur de la beauté qui ont une structure plus rigide, avec des objectifs trimestriels, voire annuels.

Dans ces conditions, il estime que la réussite des partenariats repose beaucoup sur l’énergie : de l’énergie déployée pour présenter un projet à celle nécessaire pour activer et intégrer le nouvel outil ou la nouvelle idée en interne.

Un point de vue que partage Adonis Bouzid, qui souligne que la réussite des collaborations repose sur une bonne gestion du temps, de l’argent et de l’énergie.

Les startups, ajoute-t-il, sont poussées, voire contraintes, à agir rapidement en raison des attentes des investisseurs en capital-risque. Or, les grandes entreprises du secteur de la beauté ne peuvent pas toujours répondre rapidement, la validation pouvant parfois prendre des semaines plutôt que quelques jours. C’est pourquoi « créer un pont entre la grande entreprise et la jeune startup agile » est crucial pour une meilleure gestion des délais et des flux de trésorerie.

Pour en savoir plus :

Lucas Nanini, Vice-Président de l’Innovation Parfum chez The Estée Lauder Companies, sera l’invité d’honneur de la prochaine édition du Fragrance Innovation Summit, le 26 novembre à Paris. Programme complet ici.