À Lassigny, dans l’Oise, des tubes d’un rouge rosé que Valentino lancera en 2022 sont produits à la chaîne, sur l’une des toutes nouvelles lignes de production automatisées du groupe L’Oréal. Juste à côté, d’autres modèles sont fabriqués dans une mécanique de métronome, avant d’être expédiés à travers le monde.

La pandémie a fait baisser les ventes de maquillage, victime collatérale des confinements. En France, selon le cabinet NPD Group, sur les huit premiers mois de 2021, les ventes de produits de beauté sélective restaient inférieures de 20% à celles de la même période en 2019, malgré une hausse significative par rapport à l’année précédente et qui semble s’accélérer depuis le mois de mai.

Les tendances diffèrent toutefois selon les marchés, explique Emmanuel Guichard, directeur général de la Fédération des entreprises de la beauté. Le secteur des cosmétiques français est largement dopé par l’international, qui représente 60% de ses ventes. À Lassigny, c’est même 98% de la production qui part hors des frontières, dont un tiers vers l’Asie.

En conséquence, même au coeur de la pandémie, cette usine n’a pas limité ses investissements, ni eu recours au chômage technique. « Nous avons toujours continué de fonctionner », souligne son directeur, Olivier Boudinot. Notamment pour servir le marché chinois moins affecté par la perte de vitesse du maquillage.

Désormais, « nous sommes presque revenus à notre niveau de production de 2019 », ajoute-t-il. L’usine va d’ailleurs bientôt repasser à une production sept jours sur sept pour faire face à une demande accrue.

Forte demande en Asie

« La Chine est repartie dès septembre 2020 », ajoute M. Boudinot, affichant son optimisme pour l’avenir.

Plus généralement, « on va avoir probablement une bonne année : la croissance très importante des exportations de cosmétiques vers la Chine compense la baisse de la consommation dans le monde », fait valoir Emmanuel Guichard.

Surfant sur le goût de l’Asie pour le luxe, l’usine de Lassigny a récemment étrenné ses deux nouvelles lignes de production ultra modernes, un investissement de plusieurs millions d’euros qui lui permet de gagner en agilité pour faire face à des demandes spécifiques, comme le Nouvel an chinois.

Sur une ligne, 2.000 à 3.000 rouges sont produits par heure, parfois plus. Le raisin est d’abord préparé puis chauffé dans une cuve avant d’être moulé dans son écrin. Il faut compter une vingtaine de matières premières, qui donnent à l’air ambiant une odeur sucrée.

Beaucoup de teintes sont créées, pas forcément toutes reconnaissables pour un oeil peu averti. À terme, le nouveau rouge de Valentino proposera ainsi 50 coloris. « C’est ce qu’il faut pour qu’il y ait un best-seller », explique le directeur technique Europe de L’Oréal, Alexandre Brellier.

Les mascaras sont fabriqués un peu plus loin, avec une palette plus restreinte, tandis qu’une autre partie de l’usine est consacrée aux poudres.

En tout, le site propose 1.700 références, certaines plus difficiles à concevoir que d’autres, comme un rouge à lèvres carré. « Il nous a fait transpirer », raconte Olivier Boudinot.

Car la croissance demande des efforts, même s’il faut pour cela créer des bâtons de rouge... en forme de coeur, ce qu’a fait récemment L’Oréal pour la Saint-Valentin chinoise.