L’engagement en matière de durabilité n’émane plus seulement de petites marques souhaitant se démarquer en ciblant une niche, il touche aujourd’hui l’ensemble des acteurs des cosmétiques. L’Oréal vient ainsi d’annoncer un objectif de « 95% d’ingrédients bio-sourcés, issus de minéraux abondants ou de procédés circulaires  » d’ici à 2030. Le mastodonte français, dont les ventes avoisinaient les 28 milliards d’euros l’an dernier, a par ailleurs lancé il y a deux ans un site pour répondre aux questions du public sur les ingrédients utilisés.

Le géant américain Coty intègre également des critères environnementaux et sociétaux dans le développement de ses nouveaux produits. Dernière annonce en date, un partenariat avec LanzaTech, une entreprise spécialisée dans le captage du carbone pour la production d’éthanol à partir de gaz résiduels recyclés.

Unilever, Natura &Co, Procter & Gamble, Beiersdorf ou encore Henkel, tous les géants du secteurs ont annoncé d’ambitieux plans de réduction de leurs émissions de CO2 et transformation de leurs produits vers des formules plus naturelles et des solutions d’emballages plus durables.

À plus petite échelle, Briochin, une petite marque bretonne spécialisée dans les produits d’entretien et de toilette (35 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel) propose au sein de sa gamme de cosmétiques, lancée en 2016 et entièrement labellisée bio, des shampoings solides et des « pains de toilette » à usages multiples. La marque se targue par ailleurs de formules simples pour plusieurs usages. « Avec moins de produits mais qui s’adressent à toute la famille », souligne Caroline Cantin, directrice générale adjointe.

Réservoir de croissance

Si la naturalité gagne du terrain au sein des gammes traditionnelles, les produits bio et naturels certifiés représentent encore une part réduite des ventes de cosmétiques en France : seulement 6,4%, soit 970 millions d’euros en 2020 sur un marché total estimé à près de 16 milliards d’euros, selon le cabinet Xerfi.

Mais à l’heure où la demande en produits de beauté sur les marchés matures stagne, « le bio est l’un des segments qui génère le plus de croissance en valeur absolue », affirme Benoît Samarcq, chargé d’études économiques chez Xerfi, évoquant une croissance de 8% l’an dernier.

Transformation des habitudes

La multiplication et la popularité des applications telles que Yuka, qui se font fort d’éplucher les listes d’ingrédients des cosmétiques à la recherche de produits potentiellement nocifs, contribuent à modifier les habitudes.

« Avant même la pandémie, on a vu les préoccupations sur la santé monter en puissance », observe Hervé Navellou, directeur général de L’Oréal France.

« Les consommateurs, en particulier la génération Z et les ‘millennials’, considèrent déjà la durabilité comme un facteur clé dans leurs décisions d’achat », explique aussi Thierry Molière, responsable de la recherche chez Coty, dans un courriel à l’AFP.

Face à cette « vraie tendance de fond », l’industrie est obligée de s’adapter, selon Mathilde Lion, experte beauté pour le cabinet NPD Group : « Il y a 10 ans, ce sont les marques qui diffusaient leur message. Maintenant, les consommateurs ont pris le pouvoir, ont ces attentes. Aux marques d’y répondre ».

A minima, les grands acteurs « doivent avoir des initiatives en faveur de l’environnement ou en faveur de davantage de transparence », abonde Benoît Samarcq.