Pour João Paulo Ferreira, le PDG du groupe, l’une des principales raisons du succès de Natura est la grande richesse de la biodiversité du Brésil, notamment en Amazonie, où le groupe a noué des partenariats avec les communautés locales pour extraire des essences naturelles. « L’Amazonie est un patrimoine planétaire. Nous avons la chance d’y avoir accès car une grande partie de la forêt se trouve au Brésil », explique le dirigeant, qui a reçu l’AFP au siège du groupe, près de São Paulo, la capitale économique du pays. Natura « a montré qu’il est possible de concilier progrès économique et préservation de l’environnement », assure M. Ferreira.

En 2018, le groupe Natura a enregistré un chiffre d’affaires de 13,4 milliards de réais (environ 3,7 milliards de dollars au taux moyen de l’année).

Des propos loin d’être anodins dans un Brésil très divisé par la politique environnementale du président Jair Bolsonaro. Ce climatosceptique notoire a provoqué moult controverses en raison de son intention de favoriser l’expansion de l’agro-business et des activités minières en Amazonie, où la déforestation et les foyers d’incendie ont fortement augmenté ces derniers mois. « Espérons qu’une fois que ce moment de polarisation sera derrière nous, nous parviendrons à favoriser le dialogue », entre gouvernement, propriétaires terriens, communautés traditionnelles et ONG », ajoute M. Ferreira.

« Dilemme permanent »

Le patron de Natura estime que les activités de son entreprise ont permis de préserver 1,8 million d’hectares en Amazonie, « presque la moitié des Pays-Bas ». À titre d’exemple, il cite l’ucuuba, fruit d’un arbre amazonien connu sous le nom de muscadier fou (Virola surinamensis), qui entre dans la composition de nombreux produits du groupe. Selon lui, la cueillette de ce fruit a triplé les revenus des communautés locales, sans couper le moindre arbre. « Cela montre qu’il est possible de créer de la richesse tout en laissant la forêt debout », insiste-t-il.

Pour Paulo Branco, chercheur de la Fondation Getulio Vargas (FGV), « Natura fait face à un dilemme permanent : comment maintenir une logique de croissance constante tout en respectant les écosystèmes et les communautés locales ? » Il considère que Natura est « une entreprise pionnière » au Brésil.

Expansion internationale

Le fondateur de Natura, Luis Seabra, a ouvert sa première boutique en 1969, puis le groupe a pris son essor sur un modèle de vente directe. Aujourd’hui, le groupe Natura&Co est implanté dans 73 pays, avec 32.000 employés dans le monde, dont 6.600 sur le territoire brésilien.

En 2018, le groupe a enregistré un chiffre d’affaires de 13,4 milliards de réais (environ 3,7 milliards de dollars au taux moyen de l’année), une hausse de 35% par rapport à l’exercice précédent. Le bénéfice net a en revanche chuté de 18%, à 584,4 millions de réais, notamment en raison de l’absorption de la dette du britannique The Body Shop, racheté en 2017.

En mai dernier, Natura a également fait l’acquisition d’une autre marque emblématique, l’américain Avon. Une fois que cette opération sera approuvée par les actionnaires des deux groupes et les autorités de la concurrence, Natura&Co deviendra le numéro 4 mondial des cosmétiques, derrière le français L’Oréal, l’américain Procter & Gamble et l’anglo-néerlandais Unilever. Une expansion saluée par les investisseurs à la Bourse de São Paulo : le cours de l’action du groupe brésilien est actuellement deux fois plus élevé qu’il y a un an.

« Il y a dix ans, 95% de nos affaires étaient au Brésil. Mais au cours de cette décennie, nous avons connu une forte croissance en Amérique Latine et un tiers de nos activités ont lieu en dehors du Brésil », souligne le PDG, qui ne cache pas son ambition de faire de sa société un acteur de premier plan au niveau mondial.