Grâce à ses propriétés de stabilité, d’hydratation et sa texture non grasse, le squalane est l’un des émollients les plus performants du marché. Depuis plusieurs années, son utilisation a toutefois pâti de difficultés d’approvisionnement, tant pour le squalane animal issu du foie de requin, soumis aux controverses autour de cette filière, et du squalane végétal issu de la transformation de l’huile d’olive, et soumis aux fluctuations de prix de cette ressource liée au marché alimentaire. Pour résoudre ces difficultés, la société américaine Amyris a lancé en 2011 un squalane renouvelable issu de la transformation de la canne à sucre.

Pourtant, selon l’étude de Bloom, à l’échelle mondiale, le squalane utilisé dans les produits cosmétiques serait encore largement issu du requin. « Seul le marché européen semble aujourd’hui avoir très majoritairement basculé en faveur du squalane végétal,  » affirme l’ONG. « Au Japon, premier marché mondial pour le squalane (40 % de la demande totale), le squalane végétal est quasi inexistant.  »

L’étude estime qu’environ 90 % de la production mondiale d’huile de foie de requin est destiné à la production de squalane pour le secteur cosmétique, ce qui correspond à la capture de plus de 2,7 millions de requins profonds chaque année. Par ailleurs, ces requins ne seraient pas valorisés à l’issue d’une capture accidentelle mais feraient majoritairement l’objet de pêches ciblées.

« Même si un virage très net a été pris par les entreprises occidentales en faveur du squalane végétal, le secteur cosmétique à l’échelle mondiale reste largement approvisionné par le squalane animal  » commente Romain Chabrol, auteur de l’étude. Celui-ci rappelle que des tests aveugles menés sur des produits de grandes marques de cosmétique ont montré que les entreprises étaient parfois trompées par leurs fournisseurs quant à l’origine du squalane que ceux-ci leur vendaient comme étant de fabrication végétale.

Les réglementations limitant la pêche des espèces profondes dans l’Atlantique Nord où 95% de la ressource aurait disparu, sont par ailleurs contournées par les flottes de pêches qui ont déplacé leurs efforts vers les eaux tropicales ou semi-tropicales.

«  S’éloigner des eaux réglementées de l’Union européenne, c’est le scénario idéal pour les flottes peu scrupuleuses. La seule façon de mettre fin à des pratiques de pêche aussi destructrices est de couper le robinet à la source. Nous espérons que l’industrie cosmétique entendra notre appel à se détourner de façon définitive et urgente du squalène animal  » alerte Claire Nouvian, fondatrice de l’association Bloom.

L’association souhaite notamment que les consommateurs puissent être informés de l’origine animale ou végétale du squalane contenu dans les produits qu’ils achètent.