La dépêche de l’AFP faisant état d’une recrudescence des cas d’allergies dues à la méthylisothiazolinone a été largement reprise par les médias français à la mi-décembre qui ont souvent présenté cette substance comme un nouveau conservateur utilisé en remplacement des parabènes.

Effets indésirables connus

Pourtant, ce conservateur, autorisé à une concentration maximale de 0,01 % dans les produits cosmétiques commercialisés en Europe, n’a rien d’un nouveau venu et ses effets indésirables potentiels sont largement documentés depuis de nombreuses années. L’association de chlorométhylisothiazolinone et de méthylisothiazolinone, en proportion 3/1, est bien connue de l’industrie cosmétique sous le nom commercial Kathon-CG. Autrefois très fréquemment utilisé, le Kathon-CG a été peu à peu délaissé et son usage restreint à certains produits rincés tels que les shampooings. Il a été progressivement remplacé par les parabènes qui présentaient l’avantage d’une bien meilleure tolérance et qui, jusqu’à leur mise en cause récente, assuraient près de 70% de la protection des produits cosmétiques.

Formule de la methylisothiazolinone (2-Methylisothiazol-3(2H)-one ou 2-Methyl-4-isothiazolin-3-one)

La méthylisothiazolinone a cependant vu son usage progresser de nouveau au cours des dernières années. En fait, le regain d’intérêt pour cette substance, souvent décrite comme moins allergisante que la chlorométhylisothiazolinone, est directement lié à la disgrâce des parabènes. Au final, on trouve aujourd’hui assez fréquemment ce conservateur dans différents produits de toilette (lingettes nettoyantes, savons, shampoings) sans parabènes, mais aussi dans des produits ménagers et des produits à usage industriel.

Selon le Pr Annick Barbaud, responsable de l’Unité de dermato-allergologie du CHU de Nancy, les indications fournies par le réseau de vigilance en dermato-allergologie (Revidal) mettent en évidence une recrudescence des eczémas de contact liés à la méthylisothiazolinone. La dermatologue, qui faisait le point sur les allergies de contact lors des Journées dermatologiques de Paris, qui ont réuni plus de 6000 personnes sous l’égide de la Société Française de dermatologie (SFD) du 10 au 14 décembre 2012, a également fait état de « quelques rares cas de gène respiratoire et d’irritations de muqueuses.  » Une récente étude danoise indique même une problématique montée des réactions sans contact. [1]

Quelles alternatives sûres ?

Ce phénomène n’étonne pas les spécialistes. En effet, la fréquence des allergies liées aux conservateurs croît de manière exponentielle avec l’exposition des populations donc avec la fréquence de leur utilisation par les industriels. Que le retour en popularité de la méthylisothiazolinone s’accompagne d’une recrudescence des cas d’allergies qui lui sont liés est donc assez logique.

Est-ce à dire que l’équation du remplacement des parabènes par des alternatives sûres est insoluble ? L’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM), dans une note d’information publiée en mai 2011, considérait qu’il n’était pas possible « de proposer aujourd’hui des alternatives chimiques ayant un meilleur profil de sécurité et une efficacité de conservation égale aux parabènes. Par définition, tous les conservateurs sont biologiquement actifs. En conséquence, tout conservateur peut conduire potentiellement à des problèmes de sécurité. »

Pour limiter l’exposition aux conservateurs, dont les parabènes, une diminution de la concentration des conservateurs n’est pas toujours envisageable car la protection anti bactérienne risquerait d’être insuffisante. Tant dans le secteur pharmaceutique que cosmétique, les fabricants sont aujourd’hui incités à privilégier des méthodes physiques, notamment en modifiant les conditionnements. Le développement des unidoses et des packaging dits airless répond directement à cette nécessité.