La vallée aride de la Dawkah, dans la région de Dhofar, abrite la plus grande réserve d’arbres à encens du monde, selon les autorités, avec près de 5.000 spécimens dont près d’un millier produit cette résine aux effluves envoûtantes. "Pour nous, l’encens est plus précieux que l’or, c’est un trésor", confie à l’AFP Abdallah Jaddad, un cultivateur de plus de 70 ans, adossé à un arbre.
La réserve est exploitée par la maison de parfum omanaise Amouage, dont les fragrances se vendent à plusieurs centaines de dollars la bouteille, notamment aux Galeries Lafayette à Paris, en se basant sur le savoir-faire de familles versées dans l’encens depuis des générations.
Inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2000, la vallée de la Dawkah est l’un des rares endroits au monde où pousse le boswellia, l’arbre à la précieuse écorce.
Ancien pétrole
Le commerce de l’encens, qui remonte au troisième millénaire avant notre ère, faisait route depuis le Dhofar, par voies maritimes et caravanes, jusqu’en Mésopotamie, dans la vallée de l’Indus et l’Égypte antique, et atteignait même la Grèce, Rome et la Chine. "L’encens avait à peu près la même valeur que le pétrole aujourd’hui", affirme Ahmed al-Murshidi, directeur du site archéologique de Khor Rori, dont le port servait à exporter l’encens vers le reste du monde.
La variété cultivée dans la vallée la Dawkah, le najdi, est connue pour ses vertus médicinales et cosmétiques, raconte Faisal Hussein ben Askar dont le père a fondé une boutique spécialisée dans les années 1950. "Plus l’encens est pur et net, plus il est adapté a être consommé comme traitement (médicinal), le reste servant d’encens à brûler", a-t-il expliqué en indiquant que la région de Dhofar comptait plusieurs usines spécialisées dans les huiles et les crèmes cosmétiques. La qualité la plus rare et la plus recherchée de cette résine se distingue par une couleur vert clair.
La résine est récoltée à la main selon des méthodes traditionnelles : on entaille l’écorce pour laisser s’écouler la substance gommeuse, qui se détache après avoir séchée au bout de quelques jours.
Savoir-faire
La cueillette exige un soin attentif et un savoir-faire précis. "Nous incisons l’arbre à des endroits précis et limités, environ cinq fois, pour le préserver", explique le cultivateur Musallam ben Saïd Jaddad. "Personne ne doit éventrer un arbre à encens, cela pourrait le tuer".
En 2022, la maison de parfumerie de luxe Amouage a conclu un partenariat avec les autorités omanaises pour développer la réserve de Dawkah, ne récoltant qu’un nombre limité d’arbres par saison afin de les préserver. Chaque arbre y est doté d’un code unique et suivi par une équipe de spécialistes.
La réserve devrait également se doter bientôt d’une distillerie afin de produire localement l’huile d’encens, étape clé pour son usage en parfumerie, et "se passer de la distillation française", selon son superviseur, Mohammed Faraj Istanbuli.
"Le gouvernement mène des projets essentiels (dans la région), comme la construction de routes, qui menacent d’autres zones où poussent des arbres à encens", explique-t-il. "Nous transplantons ces arbres dans la réserve. Nous en avons déjà sauvé environ 600", dit-il fièrement.
























