Premium Beauty News - Face aux nouveaux enjeux de réduction de l’emballage cosmétique, quelles sont les voies que vous privilégiez ?

Édouard Mauvais-Jarvis - Dans ce domaine rien n’est simple. Il n’y a pas de solution unique. Nous nous sommes fixé un ordre de marche qui est de réfléchir aux solutions les plus pertinentes en fonction des destinations des différents produits. Pour un flacon de grande contenance comme un démaquillant par exemple, une solution pourrait être l’utilisation d’un plastique, plus léger que le verre, en allant sur du bio-sourcing ou de la matière recyclée, et avoir un produit recyclable au bout. Pour des gammes plus premium, ce seront des produits qui resteront peut-être assez lourds mais qui seront rechargeables. Sur le parfum, nous nous dirigeons vers le rechargeable, pour le maquillage également.

Premium Beauty News - Tous les parfums Dior vont-ils devenir rechargeables à terme ?

Édouard Mauvais-Jarvis - Le fait d’avoir un très beau flacon et de pouvoir le recharger régulièrement est un véritable atout de fidélisation et une façon de limiter l’empreinte environnementale. Ça ne veut pas dire que cela va se faire rapidement car cela nécessite un certain nombre de changements, mais l’objectif est d’essayer de déployer au maximum ce genre d’initiatives dans le temps, là où c’est possible. L’éco-conception ouvre d’autres possibilités. Nous pouvons aussi développer plusieurs formats, 100 ou 30 ml pour voyager, et réduire le poids de verre sur certaines gammes. Cette solution permet de diminuer l’empreinte du matériau source, mais aussi d’alléger les coûts de transport, la charge du recyclage, …

Premium Beauty News - Pensez-vous que les consommateurs du luxe sont prêts à intégrer ces changements ?

Édouard Mauvais-Jarvis - Concernant l’allègement, il y a une phase de surprise qui est plutôt négative parce que cela remet en cause un certain nombre de faits acquis. C’est cette phase de surprise dont tout le monde à peur. Comme pour tout ce qui est vraiment innovant, il y a un risque de rejet au départ. En fait, il va y avoir une période de transition avec deux phénomènes. D’un côté le consommateur qui est habitué à une certaine idée du luxe et de l’autre, les nouveaux, ceux qui arrivent au luxe maintenant avec une tête nouvellement faite et pour qui les nouveaux standards vont s’imposer. Il va falloir faire cohabiter le luxe à « l’ancienne » et le luxe « nouveau ».

Premium Beauty News - Est-ce une réflexion systématique aujourd’hui en amont d’un développement de produit ?

Édouard Mauvais-Jarvis - Complètement, sur tous les nouveaux projets nous appliquons une réflexion radicale sur le pack. Nous sommes dans une logique d’amélioration systématique. Beaucoup de projets de rupture sont prévus, leur lancement est tributaire de certains choix stratégiques liés à la situation sanitaire mondiale.

Mais nous avons déjà fait beaucoup de choses, par exemple la mise en place d’un programme de réduction des packs de soin en supprimant les ondulés, les cellophanes, sur près de 70 références. Sur la production d’une année cela représente de quoi emballer deux fois la tour Eiffel.

Des règlementations internationales poussent aussi dans le bon sens. La règlementation coréenne impose des limites de taille de pack secondaire par rapport au pack primaire. La Chine va aussi imposer ce genre de réduction, ce sont des choses qui vont avoir un impact sur l’ensemble de nos packs.

Nous avons également créé il y a dix ans un outil de mesure environnementale de nos produits, avec comme objectif que soit améliorer de 10% la moyenne de tous nos produits. En fait nous avons déjà doublé cet objectif aujourd’hui.

Premium Beauty News - Pensez-vous que la tendance zéro déchet puisse s’appliquer au luxe ?

Édouard Mauvais-Jarvis - Le développement du digital et du e-commerce ne facilite pas le zéro pack, c’est difficilement compatible, il faut bien avoir un contenant à un moment donné. Il faudra trouver une transposition dans le luxe, c’est peut-être l’étape d’après de la rechargeabilité.