Premium Beauty News - Au plus fort de la crise, Aptar Beauty + Home a répondu présent en livrant à ses clients les éléments nécessaires à la fabrication des produits de première urgence, comme les gels hydro-alcooliques. Comment cela a-t-il été possible ?

Marc Prieur - Aptar est un groupe global qui a des usines dans le monde entier, notamment en Chine. Ces sites ont été les premiers impactés par l’émergence du nouveau coronavirus. Les mesures sanitaires qui ont été prises par le groupe en Asie (distanciation, désinfections…), ont logiquement été dupliquées et améliorées en Europe. Cela nous a permis de réagir en temps utile, de nous conformer rapidement aux réglementations et, ce qui est primordial, de protéger nos employés.

En Europe, nous avons fait le pari de rester ouvert tout au long de la crise, mais avec des situations très contrastées selon les sites. Il y a eu des baisses d’activité très significatives pour certaines catégories de produits, alors que pour d’autres il y avait un surcroit de demande. C’est ainsi que certains sites ont fonctionné à plein régime pour livrer les éléments d’emballages des produits hydro-alcooliques (pompes, closures et valves…). Nous avons ainsi pu livrer des clients, comme LVMH, qui n’étaient pas dans ce métier initialement.

Côté logistique, notre business model régional, avec des supply chains locales a été un véritable atout. Bien avant la crise, nous avions mis en place un double sourcing et des stocks de sécurité. Nous avons fait la démonstration de la robustesse de nos chaines d’approvisionnement. Nous n’avons connu aucune rupture significative, alors que même certains de nos fournisseurs ont temporairement arrêté leur activité.

Premium Beauty News - Quelle est la situation actuellement dans les différents sites Aptar Beauty + Home à travers le monde ?

Marc Prieur - Aujourd’hui, nos sites vivent des stades différents de la pandémie. D’une manière générale, toutes nos usines sont opérationnelles, mais pas toutes à leur pleine capacité bien sûr. Pour certains sites, la demande s’est amoindrie et il a fallu recourir à des solutions de chômage technique, lorsque les législations le permettaient.

En Chine, l’activité a pleinement repris et elle est quasiment revenue à la normale. En Europe, on amorce la sortie de crise. La situation est moins claire en Amérique du Nord, mais c’est un marché très résiliant et qui, pour nous, est très axé sur le personal care, donc avec une demande qui reste forte.

L’Amérique latine a été touchée plus tard et se trouve au milieu de la pandémie. La situation est gérée de façon très différente selon les pays. Certains de nos clients, très forts sur le parfum, sont très impactés même si les réseaux de vente directe, notamment via le e-commerce, ont atténué l’impact du confinement. D’une manière générale, nous observons que nos clients au Brésil et dans le reste de la zone s’organisent pour une fast recovery. La reprise pourrait être rapide. Bien sûr, le pouvoir d’achat des consommateurs risque de baisser, surtout dans les pays où le filet social est le plus faible.

Premium Beauty News - La situation est très contrastée aussi selon les catégories de produits.

Marc Prieur - Les fragrances - prestige et mass - souffrent beaucoup. C’est la catégorie la plus impactée devant le maquillage. Pour le skin care, la situation diffère selon les types de produits. En revanche, les choses vont bien pour les catégories personal care et home care - qui représentent la moitié de notre chiffre d’affaires mondial. Certes, le sun care et le hair styling ont baissé, mais cela a été compensé par la montée de l’hygiène.

En Asie on repart, il y a de nouveaux projets et un vrai dynamisme avec une demande qui semble durable.

En Europe, le retour des consommateurs dans les magasins va mettre du temps à se matérialiser dans les carnets de commandes des fournisseurs. Certains de nos clients ont fermés leurs bureaux pendant presque deux mois. Ils font le point sur leurs portefeuilles et leurs stocks.

Même si cette crise ne ressemble à aucun autre, notre anticipation est que les marques vont d’abord se concentrer sur la réduction des stocks, et qu’il y aura ensuite brusquement une urgence à livrer plus et plus vite. D’où l’importance de supply chains régionales très agiles !

Premium Beauty News - Quelle est votre vision de l’avenir immédiat du marché ?

Marc Prieur - Encore une fois, cette crise est inédite. Pendant les périodes de confinement, les gens ont moins dépensé et, là où il y a de bons systèmes sociaux, ils n’ont pas complètement perdu leurs revenus. Des plans de relance sont en préparation, mais on en ignore encore l’ampleur. La réalité sera très différente d’un continent à l’autre, voire d’un pays à l’autre.

Premium Beauty News - Quels sont les atouts du groupe dans ce nouvel environnement ?

Marc Prieur - D’abord la diversité du portefeuille. Si le marché Beauty + Home a été impacté, en revanche le marché Food + Beverage s’apprête à réaliser une bonne année et côté Pharma, la consommation est solide.

La crise a démontré la solidité de nos chaînes d’approvisionnement, ainsi que l’agilité de notre organisation régionale. Cela nous positionne comme un fournisseur incontournable pour les grandes marques mondiales. Aujourd’hui, alors que l’on parle beaucoup de relocalisation, nous ne pouvons que constater que notre business model est parfaitement adapté aux nouvelles attentes et aux tendances qui émergent.

Enfin, notre capacité d’innovation. Nous travaillons déjà sur les nouvelles tendances du marché et les nouveaux types de produits de beauté qui émergeront de la crise !

Par ailleurs, si l’environnement et la durabilité ont été un peu mis entre parenthèses au cours de la crise, ces sujets redeviendront des thèmes importants. La crise pourrait même être un accélérateur du changement car elle a été l’occasion d’une véritable prise de conscience. Aptar a beaucoup investi dans ce domaine et nous allons de facto nous trouver bien positionnés.

Premium Beauty News - En conclusion, qu’aimeriez-vous dire aujourd’hui à vos clients ?

Marc Prieur - La profession traversera cette crise, comme elle a traversé les autres. Mais un partenariat mutuel entre fournisseurs et marques sera la meilleure façon de traverser les turbulences. Nous avons tous des efforts à fournir. Et nous sommes ravis de constater que le dialogue est là, qu’il est très constructif et que la profession est très solidaire !