Nazish Munchenbach, Granado

Les groupes Natura Brasil et Boticário, les deux leaders brésiliens du marché, dominent le marché local, notamment grâce à leurs réseaux de vente directe. Ils devancent les géants mondiaux du secteur, comme l’américain Avon autre spécialiste de la vente en direct, mais aussi L’Oréal, Procter & Gamble et Unilever. Malgré leur taille, la variété de leur offre et la qualité de leurs produits, ces marques demeurent pourtant peu ou pas connues en dehors des marchés sud-américains. «  Effectivement, les opportunités à l’international n’ont pas encore été assez exploitées par les grandes marques et pas du tout par les petites,  » confirme Helen Kupfer Haas, consultante et distributeur de marques de luxe entre les marchés français et brésilien, « elles ont concentré leur croissance sur leur propre marché qui est considérable, à l’export, leur priorité a été l’Amérique Latine, en pleine expansion,  » explique-t-elle.

Autant de choix que confirme Nazish Munchenbach, Directrice marketing de Granado, marque historique et emblématique du pays qui vient de faire une entrée remarquée au Bon Marché à Paris. «  Nous commençons juste notre développement international. Pour le moment nous ne travaillons qu’avec quelques partenaires de confiance comme le Bon Marché en France, ou Palmers en Grèce, nous avons également quelques clients en Italie et Grande Bretagne mais notre priorité reste le Brésil, la plupart de nos ressources sont dédiées au marché local. »

Natura a pourtant entamé une aventure hors frontières sur un des marchés réputés les plus difficiles : la France. La marque s’est lancée dans l’hexagone dès 2005, où elle propose ses produits via une boutique, un réseau de 2000 conseillères de vente directe et un site internet. Une présence ancienne mais relativement discrète en terme de visibilité.

Exporter la brasilidade

Même si face aux coûts et contraintes logistiques, la conquête internationale n’a pas été une priorité jusqu’à maintenant, le ralentissement de la croissance locale et une concurrence de plus en plus accrue semblent faire réfléchir.

Avec le rachat de la marque australienne Aesop, Natura Brasil a mis la main sur une entreprise en accord avec ses valeurs disposant d’un réseau de boutiques propres sur plusieurs continents. Aujourd’hui, le groupe se dit prêt à développer le nombre de ses points de vente en France. Thierry Aubry-Lecomte, directeur général de Natura France nuance néanmoins l’idée d’une expansion tous azimuts, «  Humilité et sagesse nous font vivre au rythme de la planète et conditionnent une construction durable dans le temps. »

Une prudence que Granado revendique également. « Une entreprise de 145 ans peut se permettre de prendre le temps de faire les choses correctement et sans précipitation, » souligne Nazish Munchenbach.

Mais ces marques ont-elles une chance de gagner le cœur des consommatrices du monde ? Sans aucun doute, selon Nazish Munchenbach. «  Le Brésil a un énorme potentiel. C’est un pays qui inspire non seulement par sa beauté et la richesse de sa culture, sa nature et sa taille, mais aussi par la gentillesse et l’accessibilité de ses habitants. À partir de là, il y a d’énormes possibilités. »

Et Helen Kupfer Haas de confirmer. « Par sa mixité, le Brésil a un côté universel, il intéresse tous les continents et surtout il est synonyme de joie de vivre. D’ailleurs, la beauté dans le monde est aujourd’hui principalement personnalisée par les brésiliennes, elles sont les plus belles ambassadrices, à commencer par Gisèle Bündchen, les principaux mannequins viennent du Brésil, c’est un vivier. Ce n’est pas seulement leur beauté qui séduit, elles dégagent une ‘brasilidade’, un bien-être, une joie de vivre, un esprit sain dans un corps sain qui éveille l’intérêt partout dans le monde. Les grandes marques brésiliennes devraient s’en servir.  »

Une beauté universelle symbolisant la joie de vivre, une biodiversité unique au monde et riche d’ingrédients naturels d’une variété inépuisable, des rituels de beauté méconnus … tout concorde a penser que la beauté brésilienne a toutes les chances de conquérir la planète.

« Mais pour réussir, une marque brésilienne doit se concentrer sur la qualité et l’innovation, sans faire de compromis sur ces deux facteurs clés de succès, » prévient Nazish Munchenbach. L’arrivée massive sur le territoire brésilien de fournisseurs et sous-traitants internationaux et, avec eux, la sophistication croissante des outils et moyens de production devraient contribuer à accélérer la compétitivité internationale des cosmétiques brésiliens.