« Repasser du rôle de consultante et investisseuse à celui de dirigeante qui a des comptes à rendre à ses actionnaires, c’était un pari », confie Karine Melloul. Dix-huit mois après, ce pari semble gagné. Ingénieure chimiste passée par Solvay puis L’Oréal, où elle a piloté des programmes d’open innovation, la dirigeante a remis le façonnier franco-suisse sur les rails de la croissance.

À son arrivée début 2024, MS Beautilab est en pleine réorganisation. Après une période de d’alignements stratégiques, l’entreprise a choisi de se recentrer sur ses savoir-faire — émulsions, poudres, et rouges à lèvres — et sites historiques de formulation historiques. Dans ce contexte, la dirigeante s’active à consolider les pôles de production en France et en Suisse, tout en optimisant les coûts via le site de remplissage du groupe en République tchèque. Résultat : un modèle plus lisible et plus agile.

Produits hybrides

« Notre centre d’expertise maquillage et produits hybrides est à Lyon, tandis que nous avons localisé notre expertise skincare et ingrédients en Suisse, près de Lausanne », explique Karine Melloul. « Nous sommes revenus très forts dans le métier des poudres, qu’elles soient pressées ou libres, tout en consolidant notre leadership dans les rouges à lèvres et les produits pour le teint », poursuit-elle.

Pour certaines productions spécifiques ou des opérations de remplissage, MS Beautilab peut aussi faire appel à son réseau de partenaires basés en Europe, aux États-Unis et en Asie. « Ce sont des alliés stratégiques, qui nous apportent de la capacité et de l’agilité ».

MS Beautilab sert un panel de clients équilibré entre grands groupes et indie brands, tout en pariant sur quelques jeunes pousses sélectionnées avec soin. « Les uns nous font confiance pour notre rigueur et nos relais industriels. Les autres apprécient notre souplesse et notre capacité d’accompagnement. Notre offre s’adresse aux marques en quête de formules d’exception », précise la dirigeante.

Avec une croissance annuelle de 5 à 10%, MS Beautilab se fixe pour objectif de passer rapidement la barre des 50 millions. Pour alimenter sa croissance, l’entreprise mise notamment sur l’accélération de ses ventes outre Atlantique et l’innovation dans des solutions hybrides.

« Nous sommes un des rares acteurs du secteur à maitriser aussi bien les produits de couleur que les soins de la peau. L’hybride est dans notre ADN », souligne Karine Melloul.

Acteur majeur du teint et des lèvres, MS Beautilab maîtrise les techniques de coulé à chaud aussi bien que les émulsions, dans toutes les catégories. En skincare, le savoir-faire de l’entreprise est reconnue pour ses formules efficaces sans compromis sur la sensorialité.

« Cette transversalité est précieuse sur un marché où le maquillage devient soin et où le soin se colore de plus de plus ».

French touch

Sous l’impulsion de sa nouvelle dirigeante, la société accélère à l’international, notamment aux États-Unis où elle dispose d’un bureau sur la Côte Est.

« Nous y combinons notre savoir-faire franco-suisse avec les attentes locales. Nous travaillons aussi bien avec de grandes maisons, qu’avec de jeunes marques en quête de formules de pointe », détaille Karine Melloul. « C’est un marché exigeant, mais très réceptif aux produits hybrides. Notre potentiel de progression est important ».

L’Europe demeure le socle principal de l’entreprise, mais le marché américain représente déjà plus de 20% du chiffre d’affaires.

En dépit du durcissement américain vis-à-vis des importations, Karine Melloul pense que la demande pour des savoir-faire d’exception va perdurer. « La French touch n’a pas dit son dernier mot et le made in Switzerland reste une valeur sûre », affirme-t-elle. « Savoir combiner des technologies de pointe et des ingrédients naturels pour créer des formules sans compromis sur la sensorialité et l’efficacité, c’est une chose qui ne s’improvise pas. C’est le fruit d’expertises cumulées pendant des décennies ».

La dirigeante jauge avec sérénité la concurrence de la K-Beauty. « Les entreprises coréennes ont été pionnières dans la sensorialité et la construction de routines. Elles ont aussi su proposer des produits avec des SPF élevés qui ont connu un grand succès. Mais aujourd’hui, nous n’avons rien à envier en termes de sensorialité et d’efficacité. Et nous sommes plus forts en termes de naturalité ».

La différence, selon elle, tient surtout à la culture du soin. «  Les Coréens ne développent pas un produit, mais une routine cohérente autour d’un ingrédient ou d’une histoire. C’est inspirant, mais nous avons tous les atouts pour accompagner cette forte appétence pour la K-Beauty et pour la sublimer ! ».