Celso Fadelli, CEO d’Intertrade group et créateur du concept Avery Perfume Gallery

Premium Beauty News - Alors Président d’Intertrade Group, distributeur de parfums rares, vous décidez il y a 6 ans de créer le concept Avery Perfume Gallery dans un contexte où la parfumerie alternative est encore très confidentielle, pourquoi ?

Celso Fadelli - Pour moi, il était très important d’avoir un contact direct avec la personne qui utilise le produit et qui achète le parfum. Cela donne la possibilité de comprendre beaucoup plus. Je passais tous les jours dans une petite rue piétonne proche de Picadilly Street à Londres, Avery Row, où il y avait une petite boutique de fleurs. Malheureusement au moment de la crise, elle a dû fermer et j’ai repris le bail pour ouvrir notre première boutique Naturellement elle s’est appelée Avery.

Le concept initial était d’être totalement en rupture avec la parfumerie traditionnelle.

L’idée était de mettre les jus au cœur du lieu, d’enlever les packagings secondaires, le marketing habituel. Toute la décoration était faite d’objets de récupération achetés sur Portobello market. Je ne voulais pas d’une ambiance créée par une agence de design traditionnelle.

Premium Beauty News - Manifestement le public était au rendez vous ?

Celso Fadelli - Au début, ce fut difficile. Personne ne rentrait et ceux qui poussaient la porte ne comprenaient pas le concept. Et puis au bout d’un an et demi, cela a commencé à marcher. Aujourd’hui cette boutique de 20 m2 fait 450 000 livres sterling de chiffres d’affaires par an. Nous avons ouvert ensuite une seconde à la Nouvelle Orléans, les autres ont suivi dans d’autres villes et d’autres pays. Entre les boutiques et les espaces de grands magasins, nous avons aujourd’hui une vingtaine de points de vente dans le monde entier à l’exception de l’Asie.

Le fait d’avoir une présentation sans packagings, sans marketing ni communication est une idée reprise depuis par beaucoup, notamment par la Belle Parfumerie du Printemps Haussmann. Notre clientèle ne regarde pas la marque, elle regarde la qualité des jus, l’histoire du parfum, la rencontre est différente, elle se fait avec la matière première.

Premium Beauty News - Comment se profile le marché de la parfumerie de niche selon vous ?

Celso Fadelli - Aujourd’hui, il y a une grosse demande sur beaucoup de marchés, nous venons d’ouvrir au Maroc, au Mexique, en Colombie, chez Harvey Nichols, Selfridges, etc … Il y a de grandes possibilités de se développer car le regard sur la parfumerie change. C’est d’ailleurs la raison des différents rachats de marques de niche par des multinationales.

Premium Beauty News - Et en France ?

Celso Fadelli - La France est un marché difficile mais c’est normal, c’est comme vendre des pâtes à des italiens. Pour la majorité des français, le parfum c’est encore Christian Dior ou Chanel et ce pour encore longtemps, mais les choses sont en train de changer. On sent un engouement différent, une vraie légitimité pour les revendeurs à proposer des parfums alternatifs. Même chose aussi au niveau de la presse, des grands magasins, des parfumeries indépendantes en province qui augmentent progressivement la part consacrée à la parfumerie de niche si elles constatent une valeur ajoutée. Certaines peuvent arriver à faire jusqu’à 60 % de leur chiffre d’affaires sur ce créneau. Le réseau de distribution vient après la demande du marché. Qu’un magasin comme le Printemps consacre une part si importante de son nouvel espace à la parfumerie alternative est un signal important.

Premium Beauty News - Quels sont les clés du succès d’Avery Perfume Gallery ?

Celso Fadelli - Pour chaque point de vente nous élaborons un mix de marques très différentes mais qui vont rassembler un maximum de consommateurs. Des univers très variés qui s’harmonisent dans un même espace. C’est la clé du succès d’Avery, savoir cibler des publics différents avec des marques jeunes, des marques plus classiques, des marques qui touchent des sensibilités différentes.

C’est également la découverte d’un style, d’une émotion et de marques qui s’y rapportent. La dimension émotionnelle c’est l’atout de survie des boutiques. La distribution va changer pour aller vers des concepts qui nourrissent plus profondément l’expérience.