Avec une croissance à deux chiffres de ses exportations cosmétiques en 2020 par rapport à l’année précédente (+15% selon des données du service des douanes coréennes et de l’Association coréenne des cosmétiques [1]), la Corée du Sud est aujourd’hui l’un des principaux exportateurs mondiaux de produits cosmétiques. En valeur absolue, les expéditions coréennes vers les marchés internationaux se sont élevées, selon les mêmes sources, à 6.12 milliards de dollars en 2020, alors que les importations chutaient de 0,7% pour s’établir à 1,07 milliards de dollars.

Avec une base de calcul différente, le Ministère de la Sécurité des denrées alimentaires et des médicaments évalue de son côté la hausse des exportations de produits de beauté à +16,1% en 2020 par rapport à 2019, soit 7,57 milliards de dollars en valeur.

Troisième exportateur mondial

Des chiffres qui ont permis à aux autorités coréennes de revendiquer le 3e rang mondial des pays exportateurs de cosmétiques en 2020, derrière la France et les États-Unis, deux pays qui sur la même période ont vu leurs exportations pénalisées par les conséquences de la pandémie de Covid-19.

Si les exportations coréennes sont restées dynamiques en 2020, c’est notamment parce qu’elles sont encore majoritairement destinées à la Chine (50,3% du total), malgré les efforts du pays pour diversifier ses débouchés. Toutefois, le pays n’a pas été complètement épargné par la crise puisque, selon le Ministère de la Sécurité des denrées alimentaires et des médicaments, la production de cosmétiques a diminué de 6,8% en 2020 pour s’établir à 13,4 milliards de dollars environ.

Après la Chine, ce sont les États-Unis qui importent le plus de cosmétiques made in South Korea. En Europe, c’est « la France qui est la première consommatrice de produits cosmétiques Coréens avec 35%, suivi du Royaume-Uni avec 16% et l’Allemagne avec 9% », explique Zoé Maillet, spécialiste marketing chez KOTRA (Korea Trade-Investment Promotion Agency).

Un marché ultra-concurrentiel et innovant

L’engouement pour la K-Beauty a véritablement pris corps dans le sillage de ce que les médias chinois ont appelé, dans les années 1990, la Hallyu, littéralement la « vague coréenne » : c’est-à-dire, la popularité croissante de l’industrie sud-coréenne du divertissement (séries télévisées et Korean Pop principalement, mais aussi cinéma et littérature).

La beauté coréenne a d’abord été popularisée par le succès mondial de certains de ses produits emblématiques, notamment les BB creams et les cushions, dont se sont également emparées les marques européennes et américaines, soucieuses de séduire les consommateurs asiatiques. Dans le même temps, les grandes marques coréennes ont su surfer sur le succès de ces produits pour se faire connaître, tout en s’appuyant habilement sur le développement du travel retail pour gagner en notoriété auprès du public étranger.

Mais les marques coréennes tirent d’abord leur force d’un marché local particulièrement dynamique, où la concurrence féroce impose une capacité d’innovation et une rapidité de mise sur le marché à laquelle les marques occidentales étaient peu habituées. Dans ce pays, où le soin de la peau est une vraie préoccupation, aussi bien pour les femmes que pour les hommes, de grands conglomérats comme AmorePacific ou LG côtoient des Indie Brands ultra dynamiques comme Look at Me, When, Let Me Skin. Des marques qui se sont également bâti une réputation de naturalité en phase avec la demande des consommateurs, notamment grâce à des ingrédients botaniques comme le thé vert, le ginseng ou la Centella Asiatica.

Côté industriel, un riche réseau de fournisseurs et de sous-traitants a d’abord fait ses armes au service des marques japonaises, avant de devenir une référence mondiale pour ses méthodes de fabrication exemplaires et sa vitesse de production : des arguments non négligeables dans l’industrie cosmétique où les produits et les tendances changent rapidement.

Quelles tendances pour les prochaines années ?

La routine beauté coréenne séduit particulièrement les consommatrices asiatiques par sa cohérence. Elle est revanche souvent considérée comme trop lourde en Europe et en Amérique du nord. « C’est la méthode du layering. On commence par un double nettoyage avec de l’huile puis de la mousse, un exfoliant, une essence, un sérum, un masque, une crème pour les yeux, une crème pour le visage et ensuite de la crème solaire », détaille Zoé Maillet.

Cette routine beauté très complète va-t-elle pâtir de la volonté des consommatrices de réduire leur consommation et de simplifier leurs routines ? Rien n’est moins sûr ! En Asie, les consommatrices sont beaucoup moins concernées par la recherche d’une routine minimaliste et par la tendance naked beauty. Par ailleurs, la recherche de produits plus naturels et d’une peau en bonne santé devrait être favorable aux nettoyants pour le visage, un point fort des marques coréennes.

Selon Zoé Maillet, « la demande pour les produits nettoyants, comme les huiles pour le visage, les baumes nettoyants ou le cleansing foam, va monter en flèche dans les prochaines années ».

Le succès récent du Cyca, cet ingrédient à base de plantes qui se retrouve dans de nombreux soins coréens, notamment ceux de Dr Jart+, témoigne de la capacité d’innovation des marques du pays du matin calme à innover sans cesse et à s’imposer au niveau mondial, probablement pour de nombreuses années encore !