Premium Beauty News - Ce n’était donc pas une baisse conjoncturelle. Le marché du vernis à ongles connaît une vraie crise structurelle ?

Jean-François Harpes - Quand l’ensemble des marchés mondiaux du vernis à ongles baissent de 50 % à 60 % et sans un réel espoir de redressement important, on peut effectivement parler de crise structurelle. C’est d’ailleurs un schéma à peu près similaire à ce qu’ont connu les fabricants de rouge à lèvres il y a une dizaine d’année avec l’arrivée des lipgloss.

Premium Beauty News - Un véritable défi pour quelqu’un comme vous qui ne fabriquait quasiment que du vernis à ongles !

Jean-François Harpes - Il n’y a pas de mystère ! Le développement de nouvelles catégories de produits et, surtout, la diversification de notre portfolio que nous avons débutée il y a 15 ans s’avèrent aujourd’hui deux éléments clés qui nous permettent de maintenir de la croissance, de garder des usines qui tournent à plein régime, d’accroître nos investissements en Recherches et Développements, de baisser les coûts afin de rester compétitif tout en assurant notre rentabilité. C’est de cette façon que nous arrivons à compenser les fluctuations conjoncturelles mais, surtout aujourd’hui, structurelles du marché.

Premium Beauty News - D’accord mais encore faut-il faire les bons choix ?

Jean-François Harpes - Pour cela, il faut commencer par décrypter les comportements d’achats, ce qui n’est pas dans l’ADN d’un sous-traitant. Dans une approche orientée « client », il est important de communiquer aussi avec le consommateur final. Cette approche analytique qui combine panels, interactions digitales et analyses organoleptiques nous permet d’avoir une vision non pas seulement sur les vernis mais sur la totalité de la catégorie « ongles » qui comprend les vernis à ongles, les formules semi-permanentes, les formules à base d’eau, les formules naturelles, les formules hybrides et les soins. Une approche qui nous permet de répartir nos ressources sur les unités de production les plus porteuses.

Mais, bien sûr, l’innovation est évidemment essentielle. Nous avons déposé pas moins de quinze brevets en 2018 sur de nombreux produits en lien direct avec les aspirations des consommateurs comme, par exemple, des formules brevetées bio-sourcées de nouvelle génération, sans solvant classique et sans odeur qui pouvaient être perçues comme désagréables pour les consommatrices, mais aussi des formules à l’eau avec des performances optimisées ainsi que des formules hybrides grâce au savoir-faire sur la réticulation de notre unité de production « Gel Lacquers » qui offrent tenue et brillance, sans oublier de continuer, bien sûr, les travaux initiés depuis quelques années déjà comme les alternatives à la nitrocellulose…

Premium Beauty News - Votre atout principal est d’avoir su vous diversifier à temps ?

Jean-François Harpes - C’est une stratégie qui s’avère payante aujourd’hui ! Pour preuve, nous prévoyons une hausse de 25% cette année sur notre entité make-up, Luxcos, ce qui nous permet d’élargir notre offre auprès de nos clients qui voient ainsi en IL Cosmetics un groupe qui peut leur offrir des solutions complètes qui répondent à leurs besoins.

À noter que, compte tenu d’un positionnement déjà très fort sur le mascara, nous renforçons depuis quelques mois nos gammes de produits destinés aux yeux et aux lèvres en ajoutant de nouvelles références. Concernant les yeux, où nous sommes déjà leader sur les formules waterproof, l’objectif est d’offrir une solution pour chaque profil de consommatrices que nous avons identifié comme, par exemple, la mise au point de formules Vegan performantes aussi bien crème que waterproof, mais aussi des formules adaptées aux sportives offrant une résistance en toutes circonstances aux tâches liées à la transpiration et des formules qui se démaquillent facilement pour les femmes les plus pressées. Sur ce point nous présenterons une nouvelle technologie de démaquillage développées directement en lien avec les préoccupations des consommatrices à l’occasion du prochain salon MakeUp in Paris. J’en profite pour rappeler que tous nos produits seront bientôt appuyés et validés via des panels consommateurs.

Premium Beauty News - Une diversification qui s’accompagne obligatoirement d’investissements industriels ?

Jean-François Harpes - Absolument ! Sur le plan industriel, nous avons modernisé et agrandi notre usine de fabrication de vrac maquillage au Luxembourg en doublant ses capacités de production et le conditionnement de produits de maquillage débutera cet été dans notre unité située en Bulgarie (capacité 100 millions d’unités). Au total nous avons triplé notre capacité de conditionnement full service.

Premium Beauty News - Votre présence à l’international, en particulier en Chine, vous offre un bon champ de vision !

Jean-François Harpes - C’est exact ! Les marchés asiatiques sont souvent considérés aujourd’hui comme ceux qui influencent la beauté occidentale. Ainsi la Chine est le pays où l’on trouve la plus grande concentration de « Millennials », tendance centrale aujourd’hui pour les acteurs de la cosmétique. Être leader sur ce marché, comme nous le sommes, nous permet incontestablement d’anticiper les besoins des consommateurs qui vont arriver sur le continent européen. Il suffit de prendre l’exemple des vernis à base d’eau qui représentent déjà 20% à 30% du marché chinois et qui sont en train de se développer tout naturellement en France.