Dans un contexte économique difficile pour le marché italien, la 45e édition du salon Cosmoprof, qui s’est tenue du 09 au 12 mars à Bologne, en Italie, a fermé ses portes sur une légère baisse du nombre total de visiteurs (-0,9%) par rapport à l’année précédente. Selon les chiffres communiqués par les organisateurs cette baisse n’affecterait toutefois pas les visiteurs internationaux dont le nombre aurait cette année passé la barre des 40000, ce qui représente une augmentation de plus de 10% par rapport à 2011 (!).

Un paradoxe qui peut s’expliquer par la situation économique difficile en Italie, notamment dans le secteur de la coiffure, mais aussi par la montée en puissance de plusieurs concurrents.

Marché italien morose

Si l’industrie italienne de la cosmétique a annoncé une progression de 4,6% de son chiffre d’affaires en 2011, passant la barre symbolique des 9 milliards d’euros, elle le doit principalement à une forte croissante de ses exportations (+14% en 2011 par rapport à 2010).

Selon les données présentées par l’Unipro, le marché italien a progressé de 1% en 2011, tiré principalement par les ventes des pharmacies (+1,8% à 1,8 milliards d’euros) et des herboristeries (+3,9% à 380 millions d’euros), les parfumeries et la grande distribution ne progressant que de 0,7%, avec des volumes de ventes atteignant respectivement 2,28 et 4,11 milliards d’euros.

En revanche, les ventes dans les salons de coiffures ont connu un net recul (-1,5%), finissant l’année à 690 millions d’euros. Une situation principalement due, selon l’Unipro, à l’espacement des visites. Même si certains salons ont réussi à lutter contre la baisse de leur chiffre d’affaires en proposant des services et des produits plus nombreux et plus diversifiés, les ventes de cosmétiques dans ce réseau ont atteint leur plus bas niveau historique depuis les 7 dernières années.

Concurrence accrue

Dans ce contexte difficile, Cosmoprof doit également faire face, sur le marché italien, au succès de salons plus ciblés, comme Esxence à Milan ou Pitti Fragranze à Florence, tous deux consacrés à la parfumerie de niche, et qui ont mis un terme aux velléités du géant bolognais dans ce domaine. De ce point de vue, la création cette année, d’une Extraordinary Gallery supposée réunir le meilleur de la création et de l’innovation en matière de mode, de design, de beauté et même d’alimentaire n’a pas vraiment convaincu sur les possibilités de reconquête de Cosmoprof dans ce domaine.

Autre coup dur, la création, il y a deux ans du salon Intercharm Milan, s’appuie sur sa localisation stratégique dans la capitale lombarde et sur un parc d’expositions flambant neuf, pour cibler le cœur historique de Cosmoprof : les segments des produits pour coiffeurs et pour instituts de beauté. C’est certainement l’existence de ce nouveau concurrent qui explique la désaffection d’une partie du public italien, en dépit des efforts des organisateurs de Cosmoprof qui avaient réservé des emplacements de choix à deux locomotives : Essie, la marque américaine de vernis et de soins des ongles que L’Oréal a lancé en Europe l’année dernière, et Maletti, le leader de l’aménagement des salons de coiffures, spas et instituts, qui était de retour à Bologne cette année.

Halls fournisseurs : la grogne au milieu des machines

Pour ce qui est de la partie Cosmopack, regroupant les fournisseurs de l’industrie et traditionnellement installée dans les hall 19 et 20, la fréquentation semblait plus soutenue cette année que l’année dernière, au moins pour la journée du vendredi. En revanche le « cher » week-end n’a pas déçu. Il était, de l’avis de nombreux professionnels, bien terne et bien plat. La suppression, il y a deux ans, de la journée du jeudi aura eu l’effet négatif prédit par les industriels. Des avertissements qui n’avaient jusqu’à présent trouvés aucun écho auprès des organisateurs, qui avaient ostensiblement fait le choix d’un positionnement orienté vers le retail, investissant notamment dans la promotion télévisée de l’événement.

Faut-il voir les prémisses d’une réorientation de cette stratégie dans le changement de direction intervenu à quelques jours à peine de l’ouverture du salon ? Toujours est-il que la présidente du salon aux manettes depuis cinq ans, Aureliana de Sanctis, très attachée à cette stratégie « retail », a été remplacée par Duccio Campagnoli, l’actuel président du groupe BolognaFiere, qui cumulera donc les deux fonctions, avec l’appui de Dino Tavazzi et Angela Laganà, deux spécialistes de l’industrie cosmétique.

Cela changera-t-il quelque chose sur le fond ? À suivre. En tout cas, le hall 19 était cette année littéralement envahi de machines et ressemblait davantage au salon Interpak de Dusseldorf qu’à l’historique et incontournable Cosmoprof-Cosmopack Bologne que les responsables packaging ou achat de marques européennes ou mondiales n’auraient pas raté pour tout l’or du monde il y a dix ans. D’où les nombreux absents du côté des acteurs de la formulation et du packaging même si d’autres continuent, semble-t-il, de tirer leur épingle du jeu en étant toujours là.

Si, avec plus de 175000 visiteurs et 2320 exposants, Cosmoprof reste le premier salon mondial du secteur de la beauté, la nouvelle équipe dirigeante va être confrontée à une nouvelle donne et devra répondre à des questions depuis longtemps éludées sur ses priorités.