Toutes les études pointent le même phénomène : le marché mondial de la cosmétique pour hommes explose. Si l’on en croit une récente étude de Kline & Company le marché des soins pour homme n’a plus rien d’un marché de niche. Au point de rendre obsolète le terme « métrosexuel », mot-valise qui, tout au long de la première décennie du siècle, a symbolisé le nouveau comportement des hommes vis-à-vis de la beauté. « Il désignait un groupe assez spécifique, mais en 2012, dans les zones urbaines et péri-urbaines, des homme de tous types utilisent des produits de soin masculins, » explique Nancy Mills, Consumer Practice Industry Manager chez Kline & Company.

Croissance à deux chiffres

En ce qui concerne les ventes, c’est un vrai marché émergent, avec des taux de croissance à deux chiffres sur plusieurs segments. Des chiffres récents sur le marché des instruments de soins et des produits cosmétiques pour hommes [1] publiés par The NPD Group, révèle que les hommes continuent à apprécier l’intérêt de maintenir les apparences. « Les instruments de soins pour les hommes sont parmi les plus gros générateurs de croissance en valeur de toute l’industrie des soins de la personne et des catégories de produits tels que les soins pour la peau continuent de croître à un rythme élevé, » indique le cabinet d’études.

VIncent Clerc, égérie de la marque Sothys Homme

Selon Kline & Company, les ventes de cosmétiques et produits de toilettes pour hommes pourraient atteindre les 3,2 milliards de dollars aux États-Unis en 2016, alors qu’elles ne représentaient que 2,2 milliards de dollars en 2006. En ce qui concerne le marché européen, les ventes de soins ont explosé, passant de 289 millions d’euros en 2005 à 420 millions d’euros en 2010 dans les cinq principaux marchés du continent - France, Allemagne, Italie, Espagne et Royaume-Uni - selon Mintel.

L’explosion des ventes concerne également les nouveaux marchés. En Chine, le marché des soins pour hommes devrait progresser de plus de 20% par an entre 2012 et 2014 selon RNCOS.

Le boom des instruments

La progression du marché des cosmétiques pour hommes s’accompagne également d’une forte croissance des ventes d’appareils électriques spécialement destinés aux hommes.

Ainsi, au cours des 12 mois écoulés jusqu’en juin 2012, les ventes de rasoirs électriques et de tondeuses pour hommes aux États-Unis ont respectivement progressé de 9 et 12% en valeur. Selon The NPD Group, les ventes de tondeuses pour le visage ont progressé de 13% en valeur. Les tondeuses-stylo pour le nez et les oreilles représentaient 13% des ventes en dollars et ont respectivement progressé de 22 et 19 en unités. Quant aux body groomers (rasoirs pour le corps) le nombre d’unités vendues a progressé de 16% au cours des 12 mois écoulés jusqu’en juin. Les body groomers ciblent d’abord les mois de 35 ans et sont encore plus populaires chez les moins de 25 ans. [2]

Plusieurs évolutions sociologiques, affectant aussi bien les marchés matures que les marchés émergents, peuvent expliquer ce mouvement de fond qui n’a pas de raison de ralentir : le nombre croissant d’hommes employés dans le secteur des services, la concurrence accrue dans le milieu de travail, le vieillissement des baby-boomers désireux de rester élégants, et une jeune génération influencée par l’évolution des standards de la beauté masculine.

L’attractivité des points de vente

Le marché de l’homme n’est pourtant pas aussi facile à capturer qu’il n’y paraît. S’ils sont impressionnants, les taux de progression ne sont pas toujours à la hauteur de ce qu’avaient initialement espéré certains fabricants. D’autant que la concurrence s’est très fortement accrue sur ce marché.

Aux États-Unis, plus de neuf hommes sur dix utilisent aujourd’hui un produit cosmétique, affirme The NPD Group. [3] Certes, mais en dehors des produits de toilette classiques et des parfums, la progression n’est notable que sur gamme restreinte de soins du visage.

Chez Sothys, le spécialiste français des soins en instituts, pour le renouvellement de la gamme Homme on a considéré trois catégories de cibles : « les débutants, » qui utilisent le strict minimum en matière de produits cosmétiques ; « les amateurs, » utilisateurs de produits pour hommes mais qui n’hésitent pas à emprunter ceux de leur compagne, « les confirmés, » adeptes des produits les plus innovants pour une allure irréprochable.

Du fait de son positionnement, Sothys a conscience de la difficulté à investir ce marché. « Même si l’univers des produits de beauté commence à être habituel pour les hommes, il n’est pas simple pour eux de franchir le pas d’un institut. » La marque, qui réalise aujourd’hui 8 à 10% de son chiffre d’affaires sur le segment des hommes constate que, si les ventes pour hommes décollent en spas, elles restent marginales en instituts, qui représentent 90% de ses points de vente dans le monde.

Malgré l’énorme potentiel du marché des hommes, marques et détaillants doivent donc encore trouver le moyen le plus efficace de communiquer avec ces nouveaux consommateurs masculins. « Ils n’ont toujours pas élaboré de stratégies de communication spécifiques pour les hommes, et les univers de vente sont encore très orientés vers les femmes, particulièrement dans la distribution sélective,  » expliquait récemment Anne Césard, chef de projet chez Xerfi, un cabinet français d’études de marché.

Du côté de Sothys, la réponse a été de développer une gamme simple et pratique, pour séduire les hommes, mais aussi de recruter comme égérie, Vincent Clerc, joueur international de rugby et vice-champion du monde avec l’équipe de France en 2011.

La qualité du discours des marques vis-à-vis des hommes est d’autant plus importante que le monde de la beauté a jusque-là été construit autour des femmes. « Les hommes sont devenus de plus en plus conscients des avantages associés à un belle apparence, » explique Karen Grant, du NPD Group. « Ils ont pris conscience qu’une belle allure peut devenir un atout dans le milieu professionnel ainsi que dans leur vie personnelle. Cependant, les hommes ont la peau différente de celle des femmes et les marques de cosmétiques pour hommes doivent continuer à les éduquer et à les aider à se sentir à l’aise dans les points de vente si elles veulent augmenter leurs ventes sur ce marché, » ajoute-t-elle.