Marketing expérientiel et points de vente

Le plaisir comme le déplaisir des sens commencent dans le point de vente lui-même. En effet, pour 62 % des Français, faire les courses est une corvée (source Sofres, septembre 2008). Cette bonne dose d’ennui combinée à une uniformisation galopante de l’offre conduit à la dé-consommation.

Pour inverser le mouvement, Bruno Daucé, maître conférence à l’Université d’Angers, prône le recours au marketing expérientiel, «  déclinaison du marketing chargée de construire une expérience hédonique liée à la marque », précise-t-il avant de l’illustrer par trois exemples : la Maison Natura, « véritable lieu de vie à la brésilienne », Lush et ses odeurs gourmandes exhalées à l’intérieur et à l’extérieur du point de vente aménagé à la manière d’une pâtisserie, ou Yves Rocher. Celui-ci réaffirme ses racines grâce à son Atelier Cosmétique Végétale (exit le terme point de vente !), et à ses trois espaces distinctifs, une « serre végétale » pour rappeler le métier de récoltant, un « laboratoire végétal » pour le métier de fabricant et enfin un espace ressourcement (institut).

Trois façons originales de mettre en scène les produits, qui, eux aussi, ne sont plus seulement jaugés en termes d’efficacité, mais aussi de sensorialité.

Claire Deniau, SAM

Préférences sensorielles masculines

Les cosmétiques masculins, pour lesquels la société SAM Sensory and Marketing a réalisé une étude sensorielle, n’échappent pas à la quête des sens. L’étude a d’abord permis de décrypter les motivations d’achat des hommes (par ordre décroissant d’importance, la marque, le bénéfice, le type de produit, le packaging) avant de lancer l’étude de marketing sensoriel proprement dite pour déterminer le couple formule/packaging idéal.

Résultat, à marque égale, un soin énergisant conditionné en tube blanc ou gris gagnerait 10 points de parts de préférence (peu ou prou des parts de marché) par rapport à un soin anti-fatigue en tube bleu ou autre couleur... Autres enseignements, la cible masculine préfère «  les textures fraîches, faciles à étaler, indétectables, de couleur bleu ou blanche et à la fragrance musquée, » explique Claire Deniau qui dirige l’agence SAM.

Fonds de teint

Toujours en matière sensorielle, LVMH a élaboré une méthodologie pour comprendre les attentes - exprimées ou non - des consommatrices en matière de fonds de teint. 140 femmes, parmi lesquelles trois groupes ont été détectés (un premier, de 40 %, qui attendait de la légèreté et de la transparence, un deuxième, de 20 %, qui voulait du naturel mais couvrant, et un troisième, de 40 % encore, une formule satin ou légèrement poudrée) ont évalué 10 produits...

Éric Perrier, LVMH Recherche

Un mapping sensoriel a permis de constater que les groupes 2 et 3 n’avaient pas de fonds de teint parfaitement adaptés, d’où le développement de trois nouvelles formules. «  Ce type d’étude est intéressant car il nous permet de développer pour chaque groupe le profil sensoriel idéal, et donc de réduire le nombre d’essais pour nous concentrer sur des choses plus fondamentales, souligne Eric Perrier, de LVMH Recherche. Nous pourrions ainsi bâtir une cartographie sensorielle pour chaque produit, chaque zone géographique, et affiner encore les critères ».

Parfums

Ce qui est vrai pour le soin et le maquillage l’est aussi pour le parfum. De plus, celui-ci « peut être une source anti-stress », rappelle Anne Abriat de L’Oréal. Ce que confirme par la négative Boriana Atanasova (Université Rabelais, Tours), qui montre que «  les dépressifs souffrent d’anhédonie olfactive », entendez par là un renforcement des odeurs désagréables et une diminution des odeurs agréables, selon des processus complexes qui restent encore à préciser...

Anne Abriat, L’Oréal

Bref, il reste du chemin à parcourir pour comprendre, mesurer et développer la poly-sensorialité, et pour y aider, un nouveau congrès Cosmetic and Sensory est prévu en 2011.