Premium Beauty News - L’innovation est sans doute ce qui caractérise le mieux votre démarche ?

Stéphanie Bullier - C’est vrai, c’est un peu dans les gènes de la famille depuis sept générations. On est toujours très attentif à toutes les évolutions, pour ne pas dire « révolutions », qui peuvent influencer notre métier de fabricants de pinceaux. Et la mise au point de l’ebrush 1S en est l’illustration la plus originale. Ce pinceau permet de dessiner et de maquiller sur tous les écrans tactiles capacitifs du marché. L’ebrush 1S qui a reçu le prix « Coup de Cœur » du jury au dernier MakeUp in Paris est fabriqué avec le même soin que tous nos pinceaux de maquillage. Ce pinceau permet la simulation d’un maquillage et laisse libre cours à la création en entrant dans une toute nouvelle vision du maquillage, celle du high-tech.

ebrush 1S

Premium Beauty News - On n’imagine pas tout le savoir-faire qu’il faut pour fabriquer un pinceau de maquillage ?

Stéphanie Bullier - Comme vous le savez, un pinceau est composé de trois parties principales, le manche, la virole métallique et, bien sûr, les poils ou les fibres. Clairement, la partie la plus importante d’un pinceau fin est le poil. Lorsqu’on regarde un poil, on observe le « corps » qui va de la « racine » à l’extrémité pointue appelée la « fleur ». C’est elle qui détermine la finesse d’un pinceau, elle doit rester intacte et ne jamais être coupée.

Avant de commencer la fabrication des pinceaux, tous les poils d’une « botte » doivent être à même niveau sur la fleur. On utilise des machines à vibrer : le poil est placé dans des cercles métalliques en-dessous desquels des plaques montent et descendent très rapidement. Pour aider certains poils à glisser, on les saupoudre de plâtre.

Puis le poil est inséré dans un premier moule en laiton cylindrique à fond épais et plat que l’on tape rapidement sur une plaque de marbre pour « descendre le poil » sur la fleur. Le poil est alors prêt pour la fabrication des pinceaux à bout carré. Pour les pinceaux bombés ou pointus, on utilise un deuxième moule, à fond bombé. Une fois le poil descendu, on le serre côté racine avec un lien en fil de lin. C’est en faisant rouler la « mèche » entre les doigts qu’on lui donne une forme plus pointue. La dextérité de l’ouvrière est fondamentale et ne s’acquiert que par des années d’expérience.

La finesse de la fleur varie selon la nature du poil. Plus elle est fine, plus le poil est cher. Les autres caractéristiques importantes du poil sont le « ressort », sa capacité à revenir droit après avoir été courbé, et la « capacité de rétention », son effet réservoir.

Il existe également de nombreuses variétés de fibres synthétiques qui s’apparentent de plus en plus au poil naturel. La fabrication des pinceaux se fait de la même façon.
Mais encore faut-il assembler ces poils convenablement, et c’est le fruit d’une longue tradition brossière dont nous pouvons nous enorgueillir.

Premium Beauty News - Malgré la concurrence internationale et, en particulier, celle de régions comme l’Asie ou l’Inde, il est donc possible en 2012 de continuer à fabriquer des pinceaux de maquillage en Bretagne ?

Fred Ghenassia - Bien sûr que c’est possible ! Bullier-Pinceaux Léonard emploie 35 personnes et, même si nous nous approvisionnons pour partie en Inde pour certaines gammes de produits, nous réalisons à Saint Brieuc nos plus belles pièces. Je vous rappelle qu’il y a jusqu’à huit étapes différentes pour fabriquer un pinceau. Cela demande un savoir-faire très spécifique et une excellente qualité de main d’œuvre. Cette maîtrise de la fabrication nous permet aussi d’innover sur les matières employées, sur la forme du pinceau et celle des poils ou des fibres, sur le type de manche, sur la virole…. Nous venons d’ailleurs de breveter une nouvelle forme de virole qui permet une nouvelle gestuelle dans l’application du produit sur le visage.

Premium Beauty News - La période est-elle faste pour les pinceaux de maquillage ?

Stéphanie Bullier - Et bien oui ! Et c’est en grande partie grâce au secteur du maquillage professionnel qui a voulu se démarquer il y a quelques années de la vague des pinceaux de très moyenne qualité en provenance des pays émergents. Ces professionnels ont opté pour la qualité ce qui nous a incontestablement donné un coup de fouet. Un phénomène qui a ensuite déteint sur la plupart des marques. Qualité = savoir-faire, savoir-faire= Bullier/Pinceaux Léonard. Nous travaillons aujourd’hui avec les plus grandes marques. Nous sommes aussi les spécialistes des petites et moyennes séries, de cent à mille pièces. Et la part « cosmétique » dans notre activité ne cesse de croître, atteignant aujourd’hui plus de 55 % de notre chiffre d’affaires.