Une consommation premium exigeante

L’attrait est donc réel pour les marques de cosmétiques, notamment les plus niche qui proposent des formulations spécifiques : « En Norvège, les consommateurs sont de plus en plus enclins à tester de nouveaux produits avec des ingrédients particuliers ou un packaging moderne », témoigne Mathilde Mary, conseillère team France Export en Norvège. « C’est un segment premium qui se développe rapidement face à un marché mass market boosté par des enseignes low cost, de type Normal ».

Le Premium est une tendance de fond dans les pays nordiques - du parfum personnalisé aux compléments alimentaires « beauty shots » - mais… il faut pouvoir justifier son prix : « Le consommateur a certes un fort pouvoir d’achat, mais il sera exigeant sur la qualité et l’efficacité du produit », avertit Marianne Kaltiokumpu-Blomgrén, conseillère Art de Vivre en Finlande pour Business France, qui précise : « En moyenne un Finlandais va consacrer 170 euros par an aux cosmétiques ».

Même son de cloche dans les quatre autres pays de la zone : « Un bon rapport qualité prix est indispensable car les Nordiques ont des contraintes budgétaires importantes liées au coût de la vie », rappelle Bérengère Dubeuf qui cite une TVA à 24-25 % ou le prix de l’immobilier. « Et leur forte connexion à Internet les amène à comparer les produits entre eux, leurs effets prouvés et à choisir le e-commerce s’il s’avère être moins cher. En Suède, le pouvoir prescripteur des influenceurs est particulièrement fort… », d’où une recommandation appuyée de Business France à la présence digitale des exportateurs dans ces pays. « Il faut pouvoir consacrer un budget significatif au marketing digital et à la communication », avertit Mathilde Mary en Norvège. Sans compter le travail de traduction sur les sites web et sur le packaging, en anglais d’abord puis en langues locales si l’on souhaite circuler dans toute la zone.

Des produits bio ou naturels

Car le consommateur nordique semble particulièrement éduqué sur la composition des produits, et la transparence sur les ingrédients utilisés s’imposera comme un argument clé pour accéder au marché : au Danemark notamment, « le bio est devenu un prérequis davantage qu’un différenciateur », note Annemette Jensen qui cite l’application Kemiluppen pour scanner les produits cosmétiques façon Yuka.

« Il y a un vrai pouvoir du label dans ce pays, avec The Swan Label en tête de pont : pour entrer au Danemark, il peut être utile de le solliciter ». Un critère bio essentiel au Danemark donc… mais pas indispensable dans les autres pays : « Les Finlandais sont très attentifs aux produits naturels mais on a toujours de la place pour les produits qui ne sont pas bio », confirme Marianne Kaltiokumpu-Blomgrén. Idem en Norvège, Suède et Islande où les critères naturels et innovants priment sur l’éco-labellisation : « En Islande notamment, les consommateurs sont très tournés vers les produits issus d’eaux de source, de plantes médicinales ou d’extraits d’algues », précise Annemette Jensen.

Exporter dans la zone des Pays Nordiques
Un projet ? Téléchargez la plaquette d’information ici.

Distribution : Grandes enseignes et e-commerce

Dans ce pays qui fait exception en termes de population (350 000 habitants - à comparer avec les 5 millions environ du Danemark, de la Norvège et de la Finlande, et les 10 millions de la Suède), le budget annuel cosmétique par habitant est le double de celui de Danemark, une consommation qui s’explique notamment par la rudesse du climat (catalyseur pour les produits hydratants) et par l’explosion du tourisme avec plus de 2 millions de visiteurs chaque année. Cette consommation touristique se retrouve d’ailleurs aussi en Finlande, où les bateaux de croisières sur la mer Baltique sont prisés pour leurs cosmétiques sans taxes.

Mais le principal vecteur de distribution dans les pays nordiques reste la grande enseigne : Magasin du Nord (grand magasin) et Matas (parfumerie et drugstore) au Danemark, Åhlens, NK et Kicks en Suède (grands magasins et chaînes de parfumerie), Vita en Norvège (parfumerie) ou encore Stockmann et Sokos en Finlande (grands magasins, avec une présence estonienne pour Stockmann). « En Suède, ce circuit représente 60% de la distribution  », confirme Bérengère Dubeuf avant de poursuivre : « Il y a également une forte croissance sur le segment parapharmacie depuis l’ouverture du monopole d’Etat en 2009 ». Un phénomène inégal selon les pays : « En Norvège, le canal parapharmacie est beaucoup moins important qu’en France, avec des rayonnages limités pour l’offre cosmétique », signale Mathilde Mary.

Le e-commerce offre donc davantage de débouchés, avec des offres de type « beauty box » en augmentation, et des pure players web qui se lancent sur le segment cosmétique (ex : Boozt). « Au Danemark, Matas possède un webshop très performant ainsi qu’un club de fidélité très actif : trois femmes sur quatre sont désormais membres ! » appuie Annemette Jensen.

Un made in France adapté au premium

Trouver un agent ou un distributeur devient donc la clé du marché, d’autant que la concurrence est rude : « Les distributeurs sont sur-sollicités, avertit Bérengère Dubeuf : c’est pour cela qu’il faut venir avec un produit différenciant  ». En mai 2020, elle organisera avec ses homologues des pays nordiques une opération de visibilité des exportateurs français comprenant deux volets : les Beauty Days à Stockholm - une exposition physique auprès des professionnels du secteur - et la Beauty Box - un envoi d’échantillons à des importateurs / distributeurs des quatre autres pays [1].

Car l’offre française, par son image premium, a des atouts à promouvoir  : « Au Danemark, les Français pourront trouver des opportunités dans le segment haut de gamme. Ou alors en façonniers pour les marques distributeurs qui ont de plus en plus de succès », conseille Annemette Jensen. « En Norvège comme en Suède, la tendance des produits premium joue clairement en faveur des Français », confirme Mathilde Mary.

En locomotive de l’offre française, L’Oréal est souvent présent en première position sur les marchés - avec 22% de parts de marché en Finlande par exemple - et des groupes comme Dior ou L’Occitane exportent plusieurs facettes de la marque France (sans compter la présence de Sephora qui peut catalyser la distribution de marques hexagonales). Mais la concurrence n’est jamais très loin : américaine, coréenne, anglaise ou… nordique (Orkla Care en Norvège, Lumene en Finlande). « Lumene est très apprécié en Finlande avec 8,5% de parts de marché. Mais elle est davantage moyenne gamme : si le consommateur recherche quelque chose de plus haut de gamme, alors il peut se tourner vers des marques françaises », précise Marianne Kaltiokumpu-Blomgrén.

Un marché fidèle, des tendances nouvelles

Le conseil exportation numéro un sera donc surtout - on l’a compris - de proposer une innovation de packaging ou de formulation. Mais aussi de savoir répondre rapidement aux demandes des importateurs : « Il faut être réactif dans l’envoi des échantillons, très pragmatique et professionnel dans les échanges », souligne Bérengère Dubeuf. « La relation de confiance avec le distributeur est fondamentale si l’on veut s’installer dans la durée ». Tous les interlocuteurs Business France parlent alors de « marché fidèle avec des perspectives long terme » une fois la relation nouée.

Reste à creuser certains segments porteurs et des tendances qui se font jour, au-delà des gammes premium et bio : les produits capillaires, d’abord, qui observent une réelle croissance (en 2017, 33% des ventes de cosmétiques en Finlande étaient destinées à l’entretien des cheveux) mais aussi les soins pour hommes (+10% en 2018 en Finlande), les soins de spa ou le secteur des parfums (« En Norvège, on parle de ‘garde-robe’ de parfums pour différencier ceux-ci en fonction des occasions », signale Mathilde Mary). « En Finlande, le segment solaire est également à surveiller car il a affiché 40% de croissance en 2018 », signale Marianne Kaltiokumpu-Blomgrén.

Autant de segments cibles par pays qui méritent d’attirer l’œil des exportateurs les plus innovants. « Il faut arriver avec le concept qu’on n’a jamais vu ou l’emballage le plus vert possible », conseille Annemette Jensen.

Avant de conclure : « Les pays nordiques ont l’avantage d’offrir une certaine proximité : ils sont assez simples d’accès en termes logistiques et réglementaires [2]. Mais ils ont également une culture et des habitudes de consommation qui évitent de s’enfermer dans une zone de confort. Ce sont des marchés très intéressants pour les entreprises qui construisent leur maturité à l’international ».

Exporter dans la zone des Pays Nordiques
Un projet ? Une question ? Contactez-nous ici.