L’idée d’imposer aux entreprises la communication d’informations sur l’impact environnemental de leurs produits a émergé en France dans le cadre du « Grenelle Environnement » et son principe a été inscrit dans la loi. Toutefois, la difficulté technique de la tâche a conduit les autorités françaises à engager une phase d’expérimentation, prévue pour une durée minimale d’une année, à l’issue de laquelle un bilan devrait permettre de décider s’il convient d’aller plus loin, notamment en proposant d’élargir le projet d’affichage environnemental au niveau européen.

Des tests grandeur nature

Au total, 168 sociétés, parmi lesquelles 8 entreprises du secteur cosmétique [1], ont participé à la phase d’expérimentation, lancée au mois de juillet 2011. « L’expérimentation porte sur le couple produit-emballage,  » explique Juliette Mélédié, Directrice des Affaires Économiques, Environnementales et Internationales, de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). La France a fait le choix d’une approche multicritères, ne se limitant pas aux émissions de gaz à effet de serre, et basée sur l’analyse de cycle de vie (ACV), selon des méthodes de calcul identiques pour chaque catégorie de produit. En ce qui concerne les produits cosmétiques, un référentiel a été publié en avril 2011 pour les shampooings et les gels douche.

La phase d’expérimentation a pour objectifs : de permettre aux consommateurs d’intégrer les critères environnementaux dans leurs choix d’achat, de les sensibiliser sur l’impact environnemental des produits manufacturés et de donner aux entreprises l’opportunité de valoriser leurs efforts dans le domaine de l’environnement. Pour faciliter la communication auprès du public, une harmonisation de la sémantique et des visuels utilisés dans le cadre de l’affichage a d’ailleurs été proposée par l’Institut de liaisons et d’études des industries de consommation (ILEC)et ses partenaires [2].

Premiers enseignements

Un bilan de la première année d’expérimentation est en cours de réalisation et sera transmis au Parlement début 2013. Juliette Mélédié souligne que l’approche multicritères avait finalement fait la preuve de sa pertinence. « En plus des émissions de gaz à effet de serre, les indicateurs les plus souvent retenus concernent l’eau ou la biodiversité.  »

Internet a été le support d’affichage privilégié par les entreprises. « Un affichage sur trois seulement a été effectué sur le produit ou sur le lieu de vente, » précise Juliette Mélédié.

Pour Jean-Florent Campion, Responsable International Développement Durable chez L’Oréal, le bilan de la participation du géant français des cosmétiques via sa marque Garnier Ultra-Doux est assez mitigé. « Au total, ce sont 19 produits, représentant 10% du marché français des shampooings, qui ont été impliqués dans cette phase d’expérimentation. » Principale difficulté, selon lui, l’insuffisance de données précises qui oblige à se tourner vers des bases génériques. « En cas de généralisation de l’affichage environnemental, la mise en place de systèmes logistiques et informatiques complexes deviendrait nécessaire.  »

Jean-Florent Campion pointe également les incertitudes liées au mode de réalisation des ACV. En raison du manque de précision des données utilisées, l’écart entre deux produits ne serait significatif qu’au-delà de 15 à 20%.

Dans le cas des produits Garnier, les résultats ont été affichés sur le site internet de la marque. Les études conduites auprès des consommateurs abonnés du site web de la marque ont montré une très bonne perception de l’initiative et une bonne compréhension des informations. Toutefois, une étude plus large conduite en partenariat avec Carrefour auprès des clients du distributeur, a certes révélé un intérêt pour l’initiative, mais aussi un manque de confiance à l’égard des informations fournies et une très faible incidence sur l’acte d’achat.

Du côté de L’Occitane, autre participant à la phase d’expérimentation, les conclusions sont assez similaires. L’expérimentation a été conduite sur une crème pour les mains au karité, une filière bien maîtrisée par l’entreprise. L’affichage a été réalisé sur le site internet mais aussi dans les boutiques de la marque. « Il a fallu former les personnels de vente, leur apprendre à répondre aux questions des clients, notamment en apportant des conseils pratiques, » explique Marielle Le Roux, Chef de projet Eco-Conception, chez L’Occitane en Provence.

Principaux enseignements de l’expérience, selon Marielle Le Roux, une forte mobilisation des équipes de la marque mais, au final, assez peu de retours de la part des consommateurs. « Une éventuelle généralisation du dispositif impliquera d’améliorer les bases de données et les méthodes actuellement disponibles, mais aussi à préciser le cadre de l’affichage, » précise-t-elle.

Beaucoup d’obstacles techniques et pratiques devront donc encore être surmontés avant de pouvoir réellement envisager une généralisation de l’affichage environnemental. Mais il est toutefois probable que les autorités françaises et européennes demanderont à ce que les efforts dans ce sens se poursuivent.

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