Alexandrine Demachy, General Manager, Fragrance Resources France © Arno Roca

Premium Beauty News - Que constatez vous du marché de la parfumerie actuellement ?

Alexandrine Demachy - Même si d’un point de vue économique, la Chine et le Brésil ralentissent leur croissance, ce que l’on peut constater c’est que les marques s’adaptent à ces marchés tant au niveau structurel que dans leur offre produits. Les grands groupes allègent leurs structures en Europe pour s’étoffer sur les pays émergents. Elles y développent des produits spécifiques ou achètent les marques locales pour s’ancrer dans les régions. D’une manière générale et internationale, on assiste à une nouvelle diversification dans beaucoup de domaines. Plusieurs modèles fonctionnent, il n’y a plus une seule approche et d’ailleurs les plus grands commencent à regarder les petits.

Premium Beauty News - Effectivement les récents rachats de marques alternatives par de grands groupes ont été significatifs, quelles conclusions faut il en tirer ?

Alexandrine Demachy - C’est une philosophe d’acquisition très différente, on est dans la reconnaissance d’un savoir-faire. On vient prendre modèle de ces structures, de leur mode de création jusqu’à leur mode de distribution très proche du consommateur. Cela a des incidences pour nous, pour les créateurs. En sélectif, l’olfactif ne représente que 5 % environ de la valeur du produit vendu, le reste étant la part du marketing, de la communication, du packaging, etc. La parfumerie alternative inverse ce rapport. La différenciation se fait ici par la créativité, le choix des matières premières, le prix. Il faut s’adapter à ce nouveau courant qui nous est favorable. Notre structure courte et légère, permet à Fragrance Resources de le faire.

Premium Beauty News - Face à ce nouveau rapport, le mode de rémunération des sociétés de composition de parfum, uniquement basé sur le volume et non sur la création, pourrait-il être remis en question ?

Alexandrine Demachy - C’est une question récurrente. Il est vrai que tout le process de création est entièrement gratuit quelque soit l’appel d’offre. C’est une particularité à prendre en compte car contrairement aux architectes ou aux publicitaires il nous faut couvrir les frais de développement des projets non acquis. Mais les marques y sont attachées et même s’il y avait une volonté de changer les choses, il faudrait que ce soit consensuel.

Premium Beauty News - Vous parliez de la Chine, c’est pourtant une région ou le secteur du parfum peine à décoller, faut il y croire encore ?

Alexandrine Demachy - Oui l’Asie finira par se révéler et le rapport au parfum par évoluer. En Chine, le parfum est actuellement perçu comme un produit de reconnaissance vis à vis des autres, un produit-cadeau pour qui veut faire valoir son statut aisé. Or les Chinois voyagent de plus en plus et apprennent beaucoup de l’Occident, ils viendront au plaisir de se parfumer pour eux même. Mais cela prendra du temps.

Premium Beauty News - Les relais de croissance semblent multiples, l’avenir du parfum est-il tout tracé ?

Alexandrine Demachy - Le parfum sera toujours un mode de séduction. Tant que l’amour existera le parfum existera, je suis sereine sur son avenir. Néanmoins, nous allons assister à un grand chamboulement sur tous les axes. Effectivement, tous les leviers sont possibles : création, distribution, régionalisation, mode de parfumage … chacun se positionne déjà. Il faut se poser les bonnes questions, comment attirer les jeunes, comment réintéresser les consommateurs en Europe, comment parer au problème de sourcing sur une planète de plus en plus poussée à produire pour se nourrir... L’avenir doit se construire.