Allergies cutanées, asthme, maux de tête... Les professionnels du soin et de la décoration des ongles sont exposés à près de 700 substances présentes dans la composition des produits utilisés ou dans les atmosphères de travail, dont une soixantaine de substances « très préoccupantes », a averti l’Agence de sécurité sanitaire (Anses) dans un rapport publié le 23 novembre.

Selon l’enquête des experts de l’Anses, les prothésistes ongulaires et les esthéticiennes sont exposés à une soixantaine de substances "très préoccupantes". - Photo : © Rustle/shutterstock.com

L’Anses estime que les professionnels doivent mieux se protéger et recommande de renforcer « les mesures de prévention du risque chimique, afin de réduire au minimum les expositions à des agents chimiques dangereux ». Elle préconise « la recherche de produits de substitution » aux substances les plus problématiques (en particulier les monomères (méth)acryliques polymérisables, le toluène et l’acétaldéhyde), une meilleure ventilation des postes de travail (ventilation générale et ventilation localisée via des tables aspirantes) et le « port d’équipements de protection individuelle adaptés » (gants, masques).

Les (méth)acrylates dans le collimateur

Réalisés par des prothésistes ongulaires et des esthéticiennes, ces soins ont connu un essor spectaculaire ces dernières années : pose de vernis classique ou semi-permanent, manucure, pose de faux ongles (avec des gels ou des résines) et techniques de décoration ("nail art").

Selon l’enquête des experts de l’Anses, « 696 substances ont été identifiées dans la composition des produits utilisés ou dans les atmosphères de travail ». Parmi elles, « 60 ont été jugées très préoccupantes » et « figurent dans la classe de danger la plus élevée » (classées cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction et/ou inscrites sur une liste de perturbateurs endocriniens potentiels). 90 autres sont jugées « préoccupantes ».

Au premier rang des accusés, la famille des (méth)acrylates, substances utilisées dans les produits de façonnage des ongles artificiels (gel, résine). Potentiellement irritants, sensibilisants et neurotoxiques, ces composés sont selon l’Anses les principaux responsables des allergies cutanées observées chez certains professionnels et « peuvent également être mis en cause dans certains problèmes respiratoires », comme l’asthme. En conséquence, le rapport recommande « de supprimer rapidement l’usage de monomères (méth)acryliques polymérisables ».

Les professionnels du secteur sont en outre exposés à des particules venant du ponçage de l’ongle et des résines. Les risques potentiels liés à leur inhalation sont mal connus et « il apparaît nécessaire d’améliorer les connaissances » en la matière, juge l’Anses.

Elle préconise également « de rendre obligatoire une formation diplômante harmonisée », comprenant « un module sur la prévention des risques et les bonnes pratiques de travail ».

Majoritairement des femmes

Au 30 janvier 2015, le nombre de prothésistes ongulaires se montait à environ 4.700. Toutefois, « il est difficile d’estimer exactement le nombre de professionnels en exercice, cette activité étant en forte croissance », note l’Anses. Ces professionnels, qui exercent dans des salons ou à domicile, sont majoritairement des femmes de 18 à 35 ans.

Nombre d’entre elles sont d’origine chinoise : lors de leurs visites de terrain, les experts de l’Anses ont rencontré des professionnelles « maîtrisant parfois mal la langue française », ce qui peut « nuire à la compréhension des messages de prévention ».

Guide de bonnes pratiques

De son côté, la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), qui regroupe les industriels du secteur cosmétique (parfum, soin, maquillage, produits d’hygiène ou de toilette, produits capillaires…) a rappelé sur twitter avoir dès novembre 2016 publié en partenariat avec la CNEP - Confédération Nationale de l’Esthétique et la Parfumerie « un guide des bonnes pratiques destinées aux professionnels » (disponible ici).

Destiné aux esthéticiennes et prothésistes / stylistes ongulaires, ce guide souligne qu’un risque existe « en cas de contact avec les produits et en l’absence de port de gants et/ou masque efficaces » et recommande un certain nombre de mesures de prévention.