Pour les organisateurs, il ne s’agissait pas tant de comparer des marchés a priori très différents que de proposer un panorama des grandes tendances à l’œuvre dans ces zones clefs.

Brésil : un marché en construction

Helena Garcia de Gracia, Eudora

Si le Brésil est incontestablement un pays à très fort potentiel pour les industriels de la beauté, «  c’est un marché où il y a beaucoup de choses à faire  » a témoigné Helena Garcia de Gracia, directeur marketing d’Eudora, une marque du groupe Boticário.

Les femmes brésiliennes ont une culture de la sensualité et gardent le pouvoir de décision sur leur beauté. Le taux de pénétration du maquillage serait d’environ 35% et sa part du marché de la beauté au Brésil est d’environ 12%, avec un équilibre parfait entre vernis à ongles, rouges-à-lèvres et produits pour le visage (25% chacun). Mais en 2012, le maquillage est encore essentiellement vendu par l’intermédiaire de conseillères de beauté à domicile. «  Les conseillères de vente à domicile sont très nombreuses au Brésil, 2000 ou 3000 femmes qui vendent du maquillage avec uniquement une formation de base. C’est à la publicité et aux réseaux sociaux qu’incombe le travail d’éducation nécessaire pour bien utiliser les nouveaux produits. Il existe aux Brésil des blogs beauté très en vogue où les clientes décrivent leur expérience de maquillage, l’impact des billets postés et des commentaires est très fort,  » assurait Helena Garcia de Gracia.

À noter également l’importance de la diversité ethnique. Au Brésil, on ne dénombre pas moins de cent types de carnations différentes, et les carnations de type caucasien ne représentent que 49% de la population : une caractéristique que les marques doivent prendre en compte dans leur communication.

USA : l’innovation comme ADN

À la différence du Brésil, les États-Unis sont un marché mature, mais il continue de croître a un rythme soutenu. « C’est le premier marché mondial du luxe et de la beauté, la croissance en 2010-2011 a été de 9% pour le maquillage haut de gamme et de 8% pour le maquillage dans le mass. [1] Après les années de crise, c’est une renaissance,  » a ainsi expliqué Leila Rochet-Podvin fondatrice et directrice de l’agence Cosmetics Inspiration & Creation. Pour Jamie Matusow de la revue américaine Beauty Packaging Magazine «  les achats de produits de beauté sont un petit luxe que les américaines s’offrent alors que les ventes de produits électroniques et de panneaux solaires se sont écroulées.  »

Musa Pharand-Dias, Oxygen Development

Un des points saillants du marché, c’est la culture de l’innovation, notamment en matière marketing. De nombreuses nouveautés apparaissent aux États-Unis puis se diffusent ensuite dans le monde. C’est dans ce pays qu’est née la vogue des make-up artists, qu’est apparu le maquillage minéral en tant que catégorie spécifique, de même pour les Doctor’s brands.

Selon Leila Rochet-Podvin, la diversité croissante de la population américaine est une des grandes tendances à prendre en compte : «  en 2050, ceux que l’on appelle aujourd’hui ‘les minorités’ représenteront la majorité de la population des États-Unis.  » Ce qui se traduit notamment par une évolution de l’idéal de la beauté. Autres tendances identifiées par Leila Rochet-Podvin : l’éloge de la féminité avec une explosion des couleurs, la cosmétique urbaine et l’entertainment, qui se traduisent par des produits adaptés aux styles de vie contemporains, l’éthique et le développement durable, valeurs en hausse, et enfin l’émergence du healthy look, qui place la santé et la longévité au coeur des préoccupations.

Le maquillage est un élément important de la culture américaine, avec 49% des femmes qui considèrent qu’il permet d’améliorer la confiance en soit (sondage IPSOS WLT 2011).

En Asie, l’influence japonaise

Le marché asiatique reste marqué par les deux poids lourds que sont la Chine et le Japon. Pour Caroline Moulin, présidente de NaO Design Trends : « Ce qui se passe en Chine est ce qui se passait il y a huit ans au Japon, les ventes de produits de maquillage explosent totalement. On retrouve les mêmes marques en Chine que celles que l’on a au Japon. Mais il y a des différences de goûts et selon les régions, les couleurs peuvent être différentes, notamment entre Pékin et Shanghai  ». Mais le marché chinois doit encore construire sa culture du maquillage et, là aussi, les blogs jouent un rôle important. En Chine, le regard est très important, un regard noir que les femmes cherchent à agrandir, notamment grâce aux astuces piochées sur les médias sociaux autorisés par le gouvernement.

Au Japon, le marché est très différent puisque déjà très mature et subissant les effets de la catastrophe de Fukushima. «  Mais le marché continue d’innover, notamment dans le domaine du packaging avec des nouveautés très ingénieuses dans le packaging avec des systèmes de recharge,  » a précisé Caroline Moulin. «  Par ailleurs, l’électro-beauté est très présente dans les magasins.  » Le Japon a une culture très forte de la peau parfaite, le succès des BB creams tout comme la nécessité d’avoir un teint lumineux en sont les illustrations.

L’offre des sous traitants

Face à ces spécificités et au potentiel de développement de ces marchés, les participants de la table ronde ont insisté sur le rôle croissant des sous-traitants qui, à l’image des marques, étendent eux aussi leur présence mondiale. Par ailleurs, de plus en plus de sociétés choisissent de se concentrer sur le marketing en faisant appel au full service pour le développement de leurs produits. «  La sous-traitance est un service professionnel et de grande valeur ajoutée, elle permet d’apporter sur le marché d’une manière rapide de l’innovation. Aux USA, plus de 50% des produits de beauté viennent de la sous-traitance,  » témoigne Musa Pharand-Dias VP marketing de la firme américaine Oxygen Development qui a vécue en 2011 une très forte croissance.

De son côté, Thomas Weckerle, Pdg de la société allemande Weckerle assure de la capacité de sa société à garantir, dans le monde entier un même niveau de qualité : « Chaque marché peut disposer des dernières technologies et nous pouvons produire avec les mêmes outils d’une manière mondiale ». Une bonne nouvelle pour des marchés comme le Brésil où l’accès aux dernières innovations est plus difficile et où l’aide des sociétés de full service apparaît donc plus que bienvenue. «  Nos clients sont d’accord pour payer le prix nécessaire pour un produit à forte valeur ajoutée, nous veillons à prendre en compte les besoins locaux, la diversité humaine pour proposer des maquillages innovants,  » confirme Thomas Weckerle.

Finalement, le principal point commun qui a été relevé entre ces trois zones géographiques, c’est l’importance des médias sociaux et leur rôle croissant au niveau des consommateurs.