Sylvain Delteil

Premium Beauty News - L’univers des applications de maquillage en réalité virtuelle se consolide autour d’un nombre réduit d’acteurs.

Sylvain Delteil - En effet, le temps où chaque marque envisageait de développer sa propre application est terminé. D’une part, personne ne peut avoir une appli par marque sur son smartphone et, d’autre part, la volonté des marques est de s’adresser à un maximum de consommatrices, pas seulement à leurs fans.

Aujourd’hui, seules quelques applications ont réussi à agréger un nombre d’utilisatrices de significatif au niveau mondial. La suite d’applications YouCam a dépassé les 400 millions de téléchargements dans le monde, ce qui en fait un des deux leaders avec l’application Meitu, qui est très forte en Chine mais peu présente en dehors de ce marché.

Premium Beauty News - Comment expliquez-vous le succès de YouCam ?

Sylvain Delteil - Il y a d’abord la qualité des résultats obtenus avec notre technologie de maquillage en réalité virtuelle et la diversité des options disponibles. Nous travaillons en permanence à l’amélioration de la qualité du maquillage virtuel.

Notre suite d’applications (YouCam Makeup, YouCam Perfect, YouCam Fun, YouCam Nails et Beauty Circle) présente aussi une grande cohérence. C’est un écosystème très complet pensé pour permettre un voyage complet dans l’univers de la beauté, de la découverte à l’achat, en passant par le partage et l’échange…

Alice H. Chang, notre CEO a une vraie vision des besoins des femmes. Elle met la technique au service de ces besoins plutôt que de chercher à pousser des technologies…La suite YouCam n’est pas juste une création d’ingénieur, mais un ensemble pensé pour les utilisatrices. C’est pour cela, par exemple, que l’appli propose un horoscope avec des looks associés, qui engendre chaque mois un nombre d’utilisations considérable.

Premium Beauty News - Quels types de partenariats proposez-vous aux marques ?

Sylvain Delteil - C’est du sur mesure. Chaque marque a des besoins et des attentes très spécifiques. Et les besoins peuvent varier d’un pays à un autre, selon qu’elle dispose ou non de son propre e-shop. Nous offrons aux marques la possibilité de mettre leurs produits en avant. Cela peut aboutir à l’orientation de l’utilisatrice vers un site de vente en ligne, avec des taux de visites importants, même sans pub. En revanche, nous n’évaluons pas les taux de conversion car nous n’avons pas notre propre boutique.

Premium Beauty News - Comment vous rémunérez-vous ?

Sylvain Delteil - Nous facturons les marques en fonction du nombre de produits qu’elles mettent à la disposition des utilisatrices sur l’appli. Cela permet d’éviter que des produits sans intérêt trainent dans nos bases de données. Celles qui le souhaitent peuvent aussi investir en publicité, pour donner encore plus de visibilité à leurs produits.

Premium Beauty News - Vous travaillez également avec les détaillants ?

Sylvain Delteil - Les détaillants font preuve d’un intérêt croissant pour ce que nous proposons. Initialement, certains s’interrogeaient en se demandant si les applications n’étaient pas leur adversaire. On s’aperçoit que tout cela est très complémentaires. On peut utiliser les applications pour attirer les consommatrices en boutique pour des expériences personnalisées et du conseil que l’on n’a pas en ligne, faire des campagnes promotionnelles, etc.

On a aussi des cas mixtes de partenariats marques-distributeurs. Certaines marques ne renvoient pas vers leur propre e-shop mais vers celui d’un retailer. On peut mettre à la disposition des utilisatrices, à l’intérieur d’un point de vente, des tablettes qui ne proposent que les produits d’une marque donnée. C’est un moyen efficace d’engager la discussion avec la consommatrice. Et on peut faire beaucoup de tests, ce qui est impossible avec un seul produit.

Premium Beauty News - Et c’est aussi une source considérable d’informations. La collecte de données est au coeur de votre modèle.

Sylvain Delteil - Les retours analytiques sont évidemment très appréciés par nos partenaires. Nous disposons d’une quantité d’informations considérable. Pour un pays comme l’Italie, par exemple, nous pouvons observer plusieurs dizaines de milliers d’utilisations par jour pour une même marque. Et il y a de plus en plus de commentaires sur les produits.

Les marques présentes sur l’appli ont accès à un portail donnant, en temps réel et sur les six derniers mois, l’usage que les utilisatrices font de leurs produits disponibles sur l’application. Nous pouvons distinguer les produits qui sont testés, ceux qui sont utilisés pour se créer un look, et ceux ont été sauvegardés. C’est une interface dynamique qui permet de réaliser des représentations statistiques par types de produits et par teintes.

Nous pouvons aussi être mandatés par une marque pour faire des recherches précises et approfondies (deep dive) sur les données disponibles.

Premium Beauty News - Les quantités de données sont donc considérables mais sont-elles vraiment représentatives du marché ?

Sylvain Delteil - Tout dépend des marques et de leur type de clientèle. En effet, 80% de notre audience a moins de 34 ans. Les données que nous analysons sont basées sur des volumes importants, même si elles sont très typées millennials… Beaucoup de marques considèrent que nos données permettent de repérer des tendances, des signaux faibles qui peuvent permettre de déterminer des tendances émergentes… Et cela leur permet de prendre des décisions quasiment en instantané sans attendre les remontées de chiffres du trimestre.

Premium Beauty News - Quelles sont vos prochaines perspectives de développement ?

Sylvain Delteil - Nous continuons de développer les fonctionnalités de nos applications. Nous avons lancé des sessions de live cast aux États-Unis, ce qui nous permet de proposer des événements en ligne en direct : des tutoriels, des événements avec des égéries, des makeup artistes, etc.

Nous nous efforçons aussi d’affiner notre offre en travaillant sur les textures de peau au-delà de la carnation, ce qui nous permettra d’aborder les traitements et soins nécessaires. C’est plus complexe que le maquillage mais c’est un gros axe de développement…