« La première usine de biorecyclage au monde sera tricolore », a salué sur le réseau social LinkedIn le président français Emmanuel Macron mercredi, qualifiant le procédé de « révolution technologique », et l’usine à naître de « fierté française ».

Un kilo d’enzyme pour une tonne de PET

Avec sa technologie, Carbios explique pouvoir recycler des produits dont personne ne veut. L’entreprise, a signé différents accords d’approvisionnement pour des flacons, barquettes ou des vêtements en polyester notamment, même de mauvaise qualité ou sales, que la plupart des autres sociétés de recyclage ne savent pas traiter.

« La qualité du déchet entrant ne nous intéresse pas, on cherche même des déchets médiocres », explique à la presse le directeur général de Carbios, Emmanuel Ladent. « Avec une technologie comme Carbios, on va aller chercher tout ce que les autres ne recyclent pas ».

Cette solution permettra de redonner « de la valeur  » à ces déchets difficiles à recycler, évitant ainsi les qu’ils soient « enfouis ou incinérés », résume le groupe implanté à Clermont-Ferrand, au cœur de l’Auvergne, à l’occasion de la pose de la première pierre de son usine à Longlaville, en Loraine, à quelques kilomètres seulement du Luxembourg et de la Belgique.

Concrètement, une enzyme, créée par l’entreprise, a la capacité, lorsqu’elle est mêlée, dans une cuve, à des déchets, de séparer les différents composants du plastique et de mettre de côté les briques de base du polyéthylène téréphtalate (PET). Il faut environ un kilo d’enzymes pour une tonne de PET, explique M. Ladent. « Au bout de quelques heures, on a un liquide qui sort », après que l’enzyme a permis de faire la séparation du PET.

Il reste ensuite des étapes de filtration et de purification permettant la fabrication d’un nouveau PET entièrement biorecyclé, « sans en compromettre la qualité », selon M. Ladent.

Rendement élevé

Les plastiques PET sont très utilisés, mais encore actuellement majoritairement créés à partir de matières pétrolières et non issus du recyclage. Avec ce processus, pour « une tonne de déchets préparés, on sort 90% de matériau », explique M. Ladent, un chiffre « parmi les plus élevés » dans les différentes techniques de recyclage. Le reste sort « sous forme d’un gâteau, ce sont des particules, qui sera un très bon consommable, c’est idéal par exemple pour de l’énergie pour une cimenterie ».

Les déchets PET, avec idéalement « un minimum de bouteilles en plastique et un maximum de déchets difficiles à recycler » selon M. Ladent, seront recueillis dans un périmètre de « 300 à 500 kilomètres » de cette commune frontalière, en France, Allemagne, Belgique ou au Luxembourg. Diverses marques, comme L’Occitane, L’Oréal, Salomon ou Puma, sont d’ores et déjà partenaires de Carbios. Une filière dédiée au textile est notamment prévue, alors que seuls 13% d’entre eux sont actuellement recyclés, selon Carbios.

« Une décennie » de recherches » a été nécessaire pour perfectionner cette technique de recyclage dite de « dépolymérisation enzymatique », indique l’entreprise. Un premier processus de recherche et développement a été conduit dès 2011, pour passer à des tests en condition dans le laboratoire puis démonstrateur industriel de Clermont-Ferrand.

L’objectif, pour Carbios, est désormais de commercialiser sa technologie au niveau mondial par le biais de licences d’exploitation...

Implantée sur un terrain de 13 hectares, la future usine permettra de traiter 50.000 tonnes de déchets par an, ce qui représenterait, par exemple, 300 millions de t-shirts. Quelque 150 emplois, directs et induits, seront créés. L’investissement, chiffré à 230 millions d’euros en juin 2023, est en partie financé par l’État et la région Grand Est. L’usine devrait pouvoir fonctionner à plein régime en 2026.