Unilever, le géant anglo-néerlandais des cosmétiques, a été condamné vendredi par un tribunal de La Haye à retirer de la vente ses shampooings « Andrélon Champagne » et à cesser tout utilisation publicitaire de la dénomination « Champagne ». Ce jugement fait suite à une plainte du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC).

Selon les termes du jugement du 8 octobre [1] : « La dénomination Champagne est une Appellation d’Origine Protégée dont Unilever a violé les droits par la vente d’un shampooing dénommé Champagne, en infraction avec l’article 118 quaterdecies du Règlement 491/2009. [2] » Pour le tribunal, l’usage du terme champagne et les multiples publicités faisant directement allusion à la célèbre boisson alcoolisée, sont très clairement en infraction avec la législation européenne sur les dénominations protégées, qui interdit notamment d’exploiter «  la réputation d’une appellation d’origine ou indication géographique » [3].

Le tribunal interdit donc à Unilever de poursuivre la vente et la promotion de son shampooing sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, avec un plafond fixé à 500.000 euros.

Selon la presse des Pays-Bas, 340.000 bouteilles d’« Andrélon Champagne » avaient été produites à l’occasion du 70e anniversaire de la marque Andrélon.

Ce n’est pas la première fois que l’utilisation du mot champagne dans le domaine cosmétique soulève les protestations des producteurs français. On se souvient notamment de la longue bataille judiciaire qui avait opposé le CIVC et Yves Saint-Laurent après le lancement du parfum Champagne en 1993, finalement rebaptisé Yvresse après la condamnation de la maison de parfum française pour parasitisme.

« Cette décision confirme que les dénominations protégées sont des outils juridiques efficaces pour lutter contre les utilisations commerciales de certaines appellations, caractérisant un détournement de notoriété. La célèbre décision "Comité interprofessionnel du vin de Champagne c. Société Yves Saint Laurent", rendue par la Cour d’appel de Paris le 15 décembre 1993, en témoigne, » explique Matthieu Bourgeois, avocat à la Cour, et spécialiste du droit des marques et de la propriété intellectuelle au sein du cabinet KGA.

« Le règlement communautaire et la jurisprudence s’y rattachant sont d’autant plus remarquables qu’ils permettent de sanctionner toute utilisation d’une dénomination protégée, comme celle de Champagne, pour des produits différents, incluant les produits cosmétiques. »