Voici la dernière mise en garde sanitaire de la semaine. Des analyses d’urine et de prélèvements sanguins conduites auprès d’un échantillon d’une vingtaine d’adolescentes de 14 à 19 ans ont révélé la présence dans leurs corps de seize composés chimiques appartenant à quatre grandes familles : des phthalates, du triclosan, des parabènes et des muscs. Les jeunes filles ayant participé à l’étude proviennent de différents lieux des États-Unis et sont issues de différents groupes sociaux et ethniques, mais elles utilisent en moyenne 17 produits cosmétiques différents chaque jour.

Perturbateurs hormonaux

Selon l’Environmental Working Group (EWG), un groupe de pression basé en Californie, beaucoup des substances chimiques trouvées dans le corps des adolescentes ont été mis en cause en raison de risques sanitaires relevés lors de test en laboratoires sur des animaux, et ce même à de faibles doses. Les muscs synthétiques, par exemple, qui sont des ingrédients usuels dans les parfums, ont un effet estrogène, de même que les parabènes, qui sont couramment utilisés comme conservateurs.

« Les produits cosmétiques ne devraient pas contenir de perturbateurs hormonaux, en particulier les produits qui sont utilisés par des millions d’adolescentes, » indique Rebecca Sutton, l’auteur du rapport [1] et membre de l’équipe scientifique d’EWG. «  Leurs corps sont encore en développement et peuvent se révéler particulièrement vulnérables aux risques liés à ce type d’expositions, » ajoute-t-elle.

L’innocuité des cosmétiques est garantie

En réponse à cette étude, le Conseil des produits de soins de la personne (Personal Care Products Council - PCPC), a publié un communiqué réaffirmant que la sécurité et la santé des consommateurs de tous âges est la toute première priorité des fabricants de produits cosmétiques.

« Les producteurs [de cosmétiques] ont l’obligation légale de documenter l’innocuité de tous leurs produits et de leurs ingrédients, avant de les mettre sur le marché. Les attestations d’innocuité qui sont délivrées pour ces produits doivent prendre en compte le fait qu’ils peuvent être utilisés tout au long d’une vie, » a ainsi déclaré Kathleen Dezio, porte-parole du PCPC. « L’EWG a choisi de publier des données qui confortent ses objectifs plutôt que de fournir une vue complète de l’ensemble des recherches scientifiques sur ces sujets. Il y a des centaines d’études scientifiques qui ont évalué l’impact sanitaire de ces ingrédients, » a-t-elle ajouté.

Multiplication des attaques

Cette toute dernière polémique sur l’innocuité de certains ingrédients couramment utilisés dans les produits cosmétiques pourrait, à terme, obliger les fabricants, de même que les législateurs, à revoir leurs stratégies.

La multiplication des attaques de la part des groupes de pression a incontestablement des incidences sur le comportement des consommateurs. Elles ont également conduit les principaux syndicats d’industriels à créer leurs propres sites d’information en ligne. À travers leurs différents outils internet, cosmeticsinfo.com, pour le PCPC, thefactsabout.co.uk, pour la CTPA, et via parlonscosmetiques.com, pour la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), ils tentent de fournir à des consommateurs inquiets, des données factuelles, et s’efforcent de les informer sur les exigences sanitaires et réglementaires visant les ingrédients.

En Europe, la plupart des attaques les plus récentes ont été liées au débat politique et législatif sur REACH, la nouvelle législation relative aux produits chimiques. Le guide Cosmetox de Greenpeace, ou la campagne Detox du WWF, étaient tous les deux destinés à obtenir des autorités européennes la réglementation la plus sévère possible. De façon similaire, la tentation est forte également parmi les groupes d’action américains, qui font campagne pour obtenir un contrôle accru des substances chimiques, d’utiliser les cosmétiques comme un moyen de pression efficace sur les législateurs et l’industrie. Parce qu’ils font partie de notre routine quotidienne, mais qu’ils semblent moins utiles que les téléphones portables, par exemple, les cosmétiques sont des cibles faciles.

Cosmétiques à manger

La succession de ces alertes successives sur les cosmétiques pour bébés, les produits parfumés, les crèmes hydratantes et beaucoup d’autres, a pour conséquence : une méfiance générale du public vis-à-vis de tout ce qui porte le nom de « chimique », et un fort sentiment que les substances naturelles sont « évidemment » plus saines que celles fabriquées par l’homme. Résultat, la part de marché des cosmétiques naturels et bio grimpe en flèche.

Dernière mode. Partant du principe qu’une grande part de ce que nous mettons sur notre peau est finalement absorbée par le corps, certains leaders d’opinions encouragent maintenant les consommateurs à préparer leurs propres crèmes hydratantes en utilisant les ingrédients disponibles dans… leur réfrigérateur. Les cosmétiques à manger sont-ils l’avenir de l’industrie cosmétique ?