Alors que les États-Unis se relèvent peu à peu d’une crise qui a marqué leur histoire et bousculé leurs valeurs, le marché de la beauté s’est vivement redressé, faisant preuve d’une remarquable résilience. De nouvelles propositions ont émergé, surfant sur les courants « lifestyle », avec à la clef, une sensible évolution du rapport à la beauté.

C’est cette évolution que Rémy Oudghiri, Directeur de la Prospective pour l’institut IPSOS, et Leïla Rochet-Podvin, Fondatrice de l’agence Cosmetics Inspiration & Creation, ont présenté en octobre dans le cadre de Beyond Beauty Paris. Cinq grandes thématiques ont ainsi été décryptées, Rémy Oudghiri décodant les tendances sociétales et Leïla Rochet-Podvin dévoilant les tendances produits sous-jacentes.

Entre décontraction et stress

Si comparées aux Européennes ou aux Japonaises, les Américaines semblent avoir un rapport décontracté à l’apparence et valorisent davantage l’indépendance d’esprit, une analyse approfondie de leurs réponses aux enquêtes conduites par IPSOS révèle toutefois qu’il s’agit d’une réelle source de stress dans leur vie quotidienne et que l’effet du vieillissement est moins bien vécu aux États-Unis qu’ailleurs.

Les looks neutres du temps de crise ont finalement cédé la place à ce que l’agence Cosmetics Inspiration & Creation appelle «  le grand retour de l’hyper-féminin, » avec notamment un maquillage travaillé, un teint sans défaut, des yeux accentués et des lèvres plus colorées, avec un esprit de séduction plus affirmé.

Les outils au service de la beauté

La confiance en soi est au coeur de la vision américaine de la beauté (49% des Américaines en font une des raisons qui les poussent à se maquiller), qui se calque sur un modèle de plus en plus urbain et un mode de vie constamment ’on the go’. Cela se traduit par une quête de l’hyper-performance : les produits doivent être à la fois nomades, faciles d’emploi et ultra efficaces.

Résultat, les produits multifonctionnels fleurissent sur le marché. Qu’ils soient empilables (Sephora Collection), multi-brosses (chez MAC) ou en lingette (Autobronzant et exfoliant chez Dr Dennis Gross).

Du Jeunisme à la maturité

Si l’envie de paraître « plus jeune que son âge » n’est pas perçue comme ridicule aux États-Unis , comme c’est souvent le cas en France, en Allemagne ou en Italie, la crise a partiellement mis en cause la dictature du jeunisme. Les études d’IPSOS montrent que l’idée que la beauté s’acquiert avec la maturité, est peu à peu valorisée. La notion de « bien vieillir » tend à remplacer le « paraître jeune ».

Les valeurs et l’éthique en hausse

La recherche de valeurs éthiques a traversé la crise. Pour 61% des Américaines, une marque de beauté de luxe doit avoir un comportement éthique. De même, la sensibilité écologique a résisté à la crise.

« Les promesses d’éthique ne sont plus l’apanage des marques de niche, » confirme Leïla Rochet-Podvin. « En ce moment, une série de produits roses inondent les étagères, et soutiennent l’action du Pink Ribbon de lutte contre le cancer du sein. À Soho, la toute nouvelle boutique Treasure & Bond, initiative de Nordstrom, verse 100% de ses bénéfices aux associations caritatives. Pour le consommateur, les valeurs éthiques ne remplacent pas la recherche de performance ou de plaisir mais se rajoutent à celles-ci, c’est le principe du ‘double bénéfice’ ou de la ‘double bottom line’ ».

La diversité, le luxe et la beauté

La proportion de femmes membres de ce qu’on appelle « minorités ethniques » est de plus en plus importante aux États-Unis. Les enquêtes révèlent que les minorités contribuent de plus en plus à inventer de nouveaux signes de féminité.

Au-delà d’une réalité démographique, la beauté « typée » est aujourd’hui celle qui incarne de plus en plus le standard de la beauté américaine. D’après l’étude réalisée dans le magazine Allure du mois de mars, 64% des personnes interrogées pensent que la femme de carnation mixte représente le modèle de la beauté américaine. Signe d’une réalité renforcée par les magazines américains, les créateurs de mode et les marques de cosmétiques, les multiplicités ethniques sont de plus en plus présentes dans les médias.