Après avoir testé environ 10.000 composés, chacun à 15 concentrations différentes et sur différentes cibles cellulaires, l’équipe a ensuite utilisé les données ainsi recueillies pour construire des modèles prédictifs de nouvelles combinaisons chimiques. © angellodeco / shutterstock.com

«  Pour des milliers de substances chimiques auxquelles sont exposés les humains les données disponibles pour évaluer leurs effets toxiques potentiels s’avèrent insuffisantes,  » écrivent les auteurs de l’étude publiée dans la revue Nature Communications. [1] Mais les tests de toxicité traditionnels utilisant des animaux sont coûteux et les différences entre les espèces font qu’ils ne permettent pas toujours de prédire avec précision l’effet d’une substance chimique sur les humains. Ces tests sur animaux soulèvent également des préoccupations éthiques concernant le bien-être animal. « Un objectif important du programme américain Tox21 est de substituer les données de toxicité in vitro au données in vivo afin de réduire l’expérimentation animale,  » explique à l’AFP Ruili Huang, chercheur au sein du NIH et coauteur de l’étude. Mais pour ce faire, les essais de toxicité sur cellules doivent être tout aussi, ou plus prédictifs, pour l’homme que ceux réalisés sur les animaux.

Après avoir testé environ 10.000 composés, chacun à 15 concentrations différentes et sur différentes cibles cellulaires, l’équipe a ensuite utilisé les données ainsi recueillies pour construire des modèles prédictifs de nouvelles combinaisons chimiques.

« Le regroupement des composés selon des similarités de structures et de profils d’activité lors des tests révèle des relations structure-activité permettant de générer des hypothèses mécanistes,  » expliquent les chercheurs qui ont utilisé les données sur la structure et l’activité des substances pour construire des modèles prédictifs pour 72 points de toxicité in vivo.

Les chercheurs estiment que leurs modèles pourraient prédire la toxicité des substances chimiques pour les humains et les animaux. « Les modèles basés sur les données issues d’essai in vitro permettent de mieux prédire les seuils de toxicité pour l’homme que la toxicité animale, tandis qu’une combinaison des résultats des données sur les structures et l’activité aboutit à de meilleurs modèles que l’utilisation isolées des données de structure et d’activité. Nos résultats suggèrent que des profils d’activité in vitro peuvent permettre de définir la signature de mécanismes de toxicité et être utilisés pour hiérarchiser les priorités en vue d’études plus approfondies.  »

Ces modèles peuvent constituer « une alternative prometteuse aux études traditionnelles de toxicologie animale.  » Toutefois, d’autres travaux doivent être effectués pour valider et améliorer les modèles qui, selon Huang, ne pourront jamais remplacer complètement l’expérimentation animale. Ils peuvent cependant permettre aux scientifiques de hiérarchiser les produits chimiques repérés comme probablement toxiques en vue d’autres essais utilisant des méthodes traditionnelles, et ainsi de « réduire de manière significative la quantité de tests sur les animaux nécessaires, » explique-t-il.

Les militants des droits des animaux ont salué cette étude. « Pour mieux comprendre le développement humain et les maladies humaines, les scientifiques les plus avant-gardistes au monde développent et mettent en œuvre des méthodes qui remplacent l’utilisation brute des animaux,  » explique à l’AFP Julia Baines, conseiller scientifique de l’association People for the Ethical Treatment of Animals (PETA). « PETA se félicite de la richesse des méthodologies de recherche non-animales avancées qui contribuent à un avenir meilleur pour les animaux et la santé humaine. »