Le conseil est une dimension essentielle pour les petites marques confidentielles et il a largement contribué à l’intérêt porté à la parfumerie alternative. © oneinchpunch / shutterstock.com

Certes, l’époque à laquelle on demeurait fidèle à vie (ou presque) à un même parfum est révolue. En supposant qu’elle ait existée. Nous avons néanmoins, en général, un style olfactif très personnel, traduction de l’empreinte laissée dans la mémoire des autres. Reste à le connaître ou le reconnaître. Il se retrouve souvent autour de 4 ou 5 fragrances fétiches ou coup de cœur, difficiles à identifier, parmi l’immensité de l’offre de la parfumerie classique ou alternative. « Compte tenu du nombre de références en vente aujourd’hui, le consommateur est confronté à une très grande difficulté à se repérer dans l’univers du parfum. D’autant plus qu’il ne trouve plus le conseil qui existait jusque dans les années 80/90, avant l’apparition des parfumeries libre-service. Pourtant, le besoin est toujours là, » commente Juliette Faliu, co-fondatrice de l’Olfactorama et créatrice du Nez Bavard, un concept des rencontres olfactives pour curieux, amateurs et passionnés.

Le conseil d’un nouveau genre

Et pour pallier ce manque, des initiatives fleurissent à l’image de celle de Sophie Normand qui, après avoir travaillé pour des professionnels au cours de sa carrière, met aujourd’hui sa connaissance de la parfumerie au service des particuliers à l’occasion de séances de coaching olfactif.

« Je vois trop de gens qui portent des parfums ‘mainstream’ parce qu’ils ne savent pas quoi porter d’autre et je trouve que c’est dommage,  » justifie-t-elle.

Une fois renseignée d’un questionnaire de premier contact, elle affine dans un second temps la perception olfactive au cours de rencontres réalisées à domicile ou dans le quartier de l’Opéra, là ou il y a le plus de boutiques de parfums, en présentant différentes matières premières ou accords.

« L’idée est de trouver le ou les parfums qui vont correspondre à la personne. Qu’elle puisse mettre des mots sur ce qu’elle aime et ce qu’elle ressent. Selon les saisons ou en fonction des périodes que l’on traverse dans sa vie, nous sommes amenés à changer mais nous tournons souvent sur un même registre,  » explique t-elle.

À l’issue de cette étape, l’experte propose une sélection transversale d’une dizaine de parfums de niche ou grands classiques à redécouvrir, qu’elle invite à aller tester directement en magasin. « Un parfum sur la peau peut être plus ou moins présent, il peut avoir un rendu très différent, l’étape du test est donc essentielle et permettra à la personne de ne garder au final que 2 ou 3 fragrances clés,  » ajoute t-elle.

D’un profil plutôt trentenaire et parisien, les clients de Sophie Normand n’hésitent pas à consacrer la somme de 80 à 130 euros (pour la formule groupe) à cette démarche nouvelle. « La plupart de mes clients trouvent que les parfums commerciaux ne leur correspondent plus, que tout se ressemble dans le sélectif. Ils ont envie de se tourner vers une parfumerie alternative mais manquent de repères et ne connaissent pas cet univers,  » ajoute Sophie Normand.

Le conseil est en effet une dimension essentielle pour les petites marques confidentielles et il a largement contribué à l’intérêt porté à la parfumerie alternative. Au sein des boutiques Annick Goutal, l’Artisan Parfumeur ou autres Frédéric Malle, on a toujours continué de prendre le temps de la connaissance et de l’expérience. Des valeurs qui reviennent en force, les parfumeries indépendantes en font leur faire valoir, les grandes marques comme Guerlain ou Chanel, introduisent le profilage au sein de leurs boutiques en propre sur la sphère de leurs produits. Il apparaît sous différentes formes avec l’introduction de supports numériques utilisés par quelques grandes marques traditionnelles, points de vente du sélectif ou encore chez Nose, concept store cosmétique et parfums qui a développé un logiciel de diagnostic olfactif. Ou même, à plus large échelle et dans les limites imposées par un format englobant toute l’offre sélective, avec le « Code Beauté » de Marionnaud et ses conseillères équipées de tablettes tactiles.

Le digital, oui mais …

S’il arrive communément en soutien du coaching olfactif, le support digital peut néanmoins se heurter aux raisons mêmes du besoin de conseil. « Les dispositifs numériques ne remplaceront jamais le conseil d’une personne. Dans le domaine du parfum, ils n’invitent pas encore les clients à venir en magasin et resterons probablement un complément, » estime Juliette Faliu, « car le besoin d’être accompagné vient du fait que le parfum n’est pas un sujet facile à appréhender intellectuellement. Or, cela complique fortement la transmission de connaissances utiles au grand public. Ainsi, un bon conseiller doit à la fois être un bon psychologue et un bon traducteur qui saura transposer les mots du client en langage parfum. Il devra, en plus, avoir une excellente connaissance des fragrances du marché pour établir les bonnes correspondances entre ses produits et ceux cités par son client. Un logiciel ne peut pas compenser cette connaissance adaptative et ce relationnel, » ajoute t-elle.

Le digital trouve pourtant son intérêt dans son aspect communautaire, notamment auprès des jeunes pour qui le réseau prime… et souvent accompagne dans le conseil.

Expérience éphémère ou tendance de fond ?

Pour sortir de sa période trouble, le marché de la parfumerie tend à se repositionner vers un univers plus haut de gamme et exclusif. Même s’il est un peu tôt pour convenir de l’avenir du coaching olfactif, le conseil personnalisé fait indéniablement partie des instruments du luxe qu’il pourra absorber.