« C’est la faute à pas de chance, explique-t-on du côté des producteurs de carton, car la situation actuelle est le résultat d’une série d’évènements qui ont eu le malheur de tomber tous au même moment. »

Cela commence par une industrie papetière particulièrement mal en point en 2005 en raison d’une surcapacité chronique et des niveaux de prix insuffisants pour permettre un minimum de rentabilité ( à noter qu‘une machine à papier toute neuve coûte la bagatelle de 500 millions d‘euros et qu‘une « simple » chaudière de récupération en coûte 240 millions !).

Les papetiers européens décident donc de réduire leurs capacités de production. Une réduction drastique. En l’espace de trois ans, de 2007 à 2010, ce sont plus de 460 000 tonnes de capacités théoriques de carton qui vont disparaître ! Incroyable, lorsqu’on sait que la production totale avoisinait les 2,5 millions de tonnes ! Un manque de carton de près de 20 % !

Du tremblement de terre au Chili à la grève des dockers finlandais !

En 2008, c’est la crise financière ! Toutes proportions gardées, elle justifie les suppressions de capacités car les commandes s’effondrent du fait d’un déstockage massif. C’est l’année où Stromsdal supprime 70 000 tonnes et Stora fait l’impasse sur 225 OOO tonnes. Et cela continue en 2010 avec Iggesund et son usine de Workington ( - 70 000 tonnes) puis le Groupe Mayr-Melnhof qui supprime à son tour 30 000 tonnes.

Mais ce n’est pas tout ! D’autres évènements vont venir accentuer le phénomène. Comme le tremblement de terre au Chili qui impacte considérablement l’approvisionnement mondial en pâte à papier (le Chili pèse près du quart de la production mondiale). Mais il y a aussi la grève des dockers finlandais qui dure deux semaines suivie par celle du personnel des usines papetières suédoises… Enfin, et surtout, c’est le transfert d’une partie de la demande de carton fait à base de papiers recyclés vers des cartons à base de pâte vierge, dû à une polémique sur des migrations probables d’encres, avec, comme conséquences des commandes massives de Groupes de produits de grande consommation comme Nestlé … Sans oublier un hiver 2009/2010 particulièrement rigoureux en Europe du nord qui a gêné l’exploitation des forêts et la logistique en Mer du Nord.

« On a vraiment tout eu, ironise-t-on chez les papetiers concernés. Il ne manquerait plus qu’un avion s’écrase sur l’une de nos papeteries et ce sera la totale ! ».

Un avenir tendu !

Quant à l’avenir immédiat, il est effectivement plus que tendu !

En un an, les prix à la tonne auront fait un bond de plus de 20 % à 30 % selon les sortes et…, ce n’est sans doute pas fini. La pénurie ne va pas se résorber de sitôt compte tenu d’une demande qui reste très soutenue et d‘un restockage massif. Du côté d’éventuelles augmentations à venir de capacité de production, elles ne sont pas légions. M-Real vient tout de même d’annoncer 80 000 tonnes de plus pour le deuxième semestre 2011. Mais les délais de livraison ne vont pas se résorber de sitôt. Stora explique que les améliorations sur les machines existantes devraient donner un peu plus de visibilité mais sans s’engager davantage. Quant à Iggesund, le papetier suédois annonce qu’il arrivera à remettre progressivement sur le marché 20 000 tonnes… d’ici deux ans ! ( à comparer, tout de même aux 70 000 tonnes qui ont été supprimées !). Dur, dur… !