Solidarité

Première réponse de l’industrie des cosmétiques à la suite du tremblement de terre et du tsunami géants qui ont frappé le nord de l’île de Honshu le 11 mars : la solidarité avec les populations touchées par la catastrophe.

Les groupes japonais ont bien évidemment répondu massivement. Kao a fait le choix de dons en nature et a annoncé l’envoi vers les zones sinistrées de milliers de savons, de détergents, de pâte dentifrice et de brosses à dents, ainsi que de serviettes hygiéniques, couches culottes, etc. De son côté Shiseido, le leader japonais des cosmétiques, a annoncé un don de 100 millions de yens (environ 830.000 euros) ainsi que la livraison de shampooings secs, de savons et de désinfectants pour les mains.

Le groupe L’Oréal a également annoncé un don de 100 millions de yens à la Croix Rouge Japonaise. Le détaillant canadien Shoppers Drug Mart/Pharmaprix a promis 150.000 dollars ainsi que le lancement d’une opération spéciale auprès des membres de son programme de fidélisation. Procter & Gamble, Amway, Temptu, Lush, Shu Uemura, Hanae Morri ont également fait un geste.

Désorganisation industrielle

L’autre urgence pour l’industrie est de répondre aux conséquences immédiates des catastrophes sur le marché.

Le tremblement de terre et le tsunami ont détruit ou endommagé une partie de l’appareil productif et des infrastructures. Au-delà de la zone directement touchée dans la région de Sendai, qui représentait 7 à 8 % du PIB japonais, la crise énergétique consécutive de l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi perturbe la production dans une bonne partie du pays. Un mois après le tremblement de terre, les coupures de courant étaient encore quotidiennes et elles perdurent.

À cela s’ajoutent les problèmes logistiques après la destruction d’une partie des infrastructures routières, difficultés amplifiées par l’organisation en flux-tendus de l’économie, et bien sûr la persistance de l’inconnue nucléaire...

Les analystes économiques s’accordent sur une chute du PIB pour le pays au cours du trimestre d’avril à juin. La prévision la plus optimiste envisage un recul de 0,6 %, la plus pessimiste un plongeon de 10 %. La plupart tablent sur un retour à la croissance pour le trimestre de juillet à septembre, et un véritable redécollage stimulé par l’effort de reconstruction à partir du quatrième trimestre est attendue.

L’impact de la catastrophe a été immédiat sur les entreprises japonaises. Shiseido vient d’annoncer une chute de 62% de ses bénéfices au cours de son dernier trimestre fiscal (à 3,8 milliards de yens contre 10 milliards au cours du même trimestre l’année dernière), une chute principalement liée aux surcoûts consécutifs au tremblement de terre du 11 mars.

Problèmes d’approvisionnement

Les conséquences au niveau mondial sont plus mesurées. Bien sûr, le Japon est encore le deuxième marché mondial pour les cosmétiques, mais le taux de pénétration des entreprises étrangères est relativement faible et encore très cantonné dans les segments les plus luxueux. Les grands exportateurs mondiaux devraient donc absorber le choc, même si le commerce voyageur et les ventes des produits de luxe seront affectés dans un premier temps.

L’industrie cosmétique mondiale pourrait en revanche subir quelques difficultés d’approvisionnement en ingrédients et produits intermédiaires produits au Japon. Conséquence de l’avance technologique acquise au cours des années 1990 par l’industrie japonaise en matière de traitement de surface, 30 à 40% des pigments traités et de certaines poudres (notamment des oxydes de titane) utilisés par l’industrie mondiale du maquillage proviennent de fournisseurs japonais tels que Nippon Shikizai, Miyoshi Kasei (voir mise à jour ci-dessous) ou Nikko Rica. Bien que les sites de production de ses fournisseurs n’aient pas étés directement touchés par le tremblement de terre et le tsunami, ils sont affectés par les problèmes d’organisation industrielle qui concernent tout le Japon.

Inquiétudes sanitaires

Reste qu’une fois ces problèmes surmontés, l’industrie japonaise devra rassurer sur l’innocuité de ses produits. De ce point de vue, la légèreté des autorités laisse perplexe puisque, selon l’Union européenne, elles n’effectuent pas de mesure du taux de radioactivité des produits exportés.

Reconnaissant que le risque de contamination n’est pas limité aux produits alimentaires, DKSH, un des principaux distributeurs de spécialités chimiques d’origine asiatique, vient d’annoncer la mise en place d’une Task force interne chargée de recueillir toutes les données sur les produits éventuellement concernés, et d’anticiper d’éventuels changements réglementaires.

À ce jour, aucune contamination de marchandises non-alimentaires en provenance du Japon cependant n’a été détectée par les pays destinataires.

Dans un communiqué daté du 30 mars 2011, la Japan Cosmetic Industry Association (JCIA), l’organisme représentant les industriels japonais de la cosmétique, a rappelé que la qualité de l’air des ateliers de production est généralement contrôlée. L’association admet toutefois que «  de l’eau potable faiblement contaminée » peut être utilisée dans le processus de industriel, mais que les doses concernées ne présentent pas de danger pour la santé. Dans un marché constitué de produits fortement substituables, il risque d’en falloir davantage pour convaincre les consommateurs ! C’est ainsi que Shiseido a publié sur son site internet un communiqué, daté du 22 avril, précisant qu’à la suite de contrôles conduits en collaboration avec une organisation extérieure, aucune radiation n’avait été détectée dans ses produits fabriqués au Japon.

Nouvelles habitudes de consommation ?

Côté demande, il est bien évident qu’à court terme les priorités des consommateurs japonais vont être réorientées. La grande inconnue est celle de l’impact à long terme de ces catastrophes, et surtout de l’accident nucléaire de Fukushima Daiichi qui met directement en cause le modèle japonais de production et de consommation.

La nécessité de partager la production électrique, les reportages télévisés sur les ruptures d’approvisionnement de certains produits et les témoignages de consommateurs expliquant que, tout compte fait, l’on peut très bien vivre avec moins de superflu, sont peut-être en train de transformer les consommateurs japonais.

Une chose est sure, le Japon, qui a déjà surmonté de graves crises a encore la capacité de nous surprendre.

Mise à jour du 04 mai 2011 - Myoshi Kasei Europe nous informe aujourd’hui que les difficultés rencontrées sur ses sites au Japon dans la période suivant le tremblement de terre et le tsunami sont en cours de résolution et que ses clients ne devraient connaître aucun problème d’approvisionnement.